Les âmes d'Atala

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Histoires hétéroclites

Les Ames d’Atala

Fabula

Les Féeries intérieures

Feuilles d’automne-1 Feuilles d’automne-2

Le Grognard-1

Le Grognard-2

La Manche libre, édition de Cherbourg, 23 janvier 2010, p. 26
La Presse de la Manche libre, 23 janvier 2010, p. 13

Céline Guénolé, « Des inédits de Gourmont réunis en un volume », La Presse de la Manche libre, 1er 2010, p. 6

 

 

 

 

 

 

 

Sommaire :

AVIS AU LECTEUR, par Christian Buat

HISTOIRES HETEROCLITES

Le petit médecin
Vieux poète !
L’automate
L’alcool
Le camaldule
De l’action morale ou le dieu des propriétaires
Métaphrases : Les actes de saint Maximilien, martyr
Lettre à un marabout
La marquise
Le sang violet
Le mot qu’il ne fallait pas dire
Le polichinelle
Hélène Jégado
La deux mille et unième langue
L’homme des bois
Les bons parents
Le premier homme
Notre ancêtre
Fable

LE DESTRUCTEUR

Le bracelet
Avant l’amour
Elva
D’un pays lointain
L’âme que je cueillis
L’une ou l’autre
Le panorama de la vieille dame

REFERENCES

LES PROMENADES NARRATIVES DE REMY DE GOURMONT, par Mikaël LUGAN

 

23/12/2013 - Commenter

Histoires hétéroclites

HISTOIRES HETEROCLITES

 Les Amateurs de Remy l’attendent avec impatience, mais comme vous avez pu le remarquer, la date de parution d‘Histoires hétéroclites a été reportée à quelques semaines. Ce retard est dû à l’imprimeur qui n’a pas su respecter ses délais à cause de problèmes informatiques puis de surcharge de travail. C’est Noël, vous comprenez ! Le petit Jésus vient nous emmerder jusque dans les ateliers ! En attendant, allez donc lire, à l’occasion de la pressante parution de cette édition collective en partie originale,  quelques réflexions sur la science du livre ici, sur l’excellent blog d’un libraire d’occasion et de ses amis, Feuilles d’Automne… Lire la suite »

19/12/2009 - Commenter

Histoires hétéroclites

HISTOIRES HETEROCLITES

sortie prévue le 15 décembre 2009

Edité par les Ames d’Atala : Histoires hétéroclites, suivi du Destructeur . Ces textes de Remy de Gourmont, réunis par Ch. Buat & M. Lugan, — et postfacés par ce dernier, — ont pour commun d’avoir connu une édition pré-originale, journal ou revue, et de n’avoir jamais été, — à quelques exceptions près, — recueillis par la suite. L’ordre suivi est chronologique, sauf pour sept textes révélés être les chapitres d’un roman inédit, — et incomplet : le Destructeur.flyergourmontada

25/11/2009 - Commenter

Retour sur zone

Nous ne sommes pas vraiment en désaccord, dirons-nous, avec la chronique de Sébastien Navarro lue sur le site camarade A Contretemps des VINGT ET UN TÉMOIGNAGES DE GENS AYANT LUTTÉ SUR LA ZAD, pour ce que nous en avons lu, publié récemment par un copain du pays nantais. Nous la reproduisons ici in extenso.

L’hypothèse serait à même de nourrir quelque mise en abîme : si l’histoire est écrite par les vainqueurs, qu’en est-il de ces vaincus nichés au milieu des vainqueurs ? Qu’on se souvienne : le mercredi 17 janvier 2018, le premier porte-flingue de la Macronie, Édouard Philippe, l’œil grave et le poil encore bien là et bien brun, sifflait la fin de partie d’un projet vieux d’un demi-siècle : la construction d’un aéroport sur le site de Notre-Dame-des-Landes au bénéfice du Grand Ouest du pays. « Un tel projet d’aménagement qui structure un territoire pour un siècle ne peut se faire dans un contexte d’opposition exacerbée entre deux parties presque égales de la population », reconnaissait le boss de l’exécutif. Après dix ans de lutte, le bocage était sauvé du bétonnage. Enfin, une lutte qui payait ! L’occasion était suffisamment rare pour être fêtée et soulignée. Vu de loin, une lecture enthousiaste des faits se suffisait à elle-même : les zadistes avaient remporté leur bras de fer avec le pouvoir. Vu de près, les choses étaient un peu plus compliquées. Qu’on se souvienne encore du slogan scandé par les « tritons crêtés » à la face des aménageurs : « Contre l’aéroport et son monde ». Si la première manche semblait acquise, qu’en était-il de l’ambitieuse seconde proposition ? Qu’en était-il de ce « monde » qu’il s’agissait d’affronter, voire de défaire ? Car la zad ne fut pas seulement une zone à défendre, elle fut aussi le lieu d’expérimentations diverses visant, ambitieusement, à extirper du champ capitalistique des pans entiers de nos vies : habitat, nourriture, agriculture, relations sociales, etc.

Une précision s’impose : sur cette terre de lutte, le soussigné n’a jamais foutu les pieds. Non pas que l’envie ou la curiosité n’aient pas été là, mais l’opportunité, pour faire court, ne s’est jamais présentée. On savait, grossièrement, que plusieurs tendances, allant des « citoyennistes » à des franges plus radicales, cohabitaient bon gré mal gré sur place, s’adaptant et réagissant en fonction des niveaux de conflictualité imposés par l’État et sa flicaille. On savait, par expérience, que tout front de lutte à prétention horizontale doit aussi lutter contre ses dissensions internes et ses chefferies informelles. Il n’y avait aucune raison que Notre-Dame-des-Landes, malgré son aura pugnace et audacieuse, malgré sa cote de popularité et cette espèce d’exemplarité qu’elle semblait annoncer pour l’avenir, échappe à la loi du genre. Cela dit, bon nombre de copains et copines ayant fait un séjour sur place en revenaient souvent avec la banane. En février 2016, le journaliste Nicolas de la Casinière, indécrottable optimiste et ferrailleur contre la pieuvre maffieuse Vinci, notait dans un article paru dans CQFD : « Malgré les disparités, les sensibilités et les options stratégiques, malgré les tentatives de division orchestrées par le préfet et reprises par les médias, la cohésion tient solidement entre paysans historiques et zadistes, le collectif de paysans Copain, l’association citoyenne Acipa, la coordination qui intègre syndicats et groupes politiques, le groupe d’élus CéDPa [2], les Naturalistes en lutte, les comités anti-aéroport de toute la France, récemment ravivés après des mois de sommeil [3]. » Preuve d’une telle cohésion : deux ans après, le projet d’aéroport était définitivement enterré.

L’histoire aurait pu en rester là, jusqu’à ce que nous soyons contactés par un mystérieux « A » nous proposant de recenser un bouquin sur la zad, un texte donnant « un point de vue à la fois “joyeux” et critique » et accordant la voix à ceux ayant fait « partie du “camp” des perdants, après la “victoire” de 2018 ». Curieux de l’affaire et de ses guillemets pleins d’équivoque, nous disons bingo. Quand le bouquin débarque à la maison, un mélange de perplexité et d’étonnement nous saisit. Peu de place est laissé à l’objet livre dans une recension. C’est un tort. Une couverture peut être douce à l’œil ou d’une gerbante mocheté, un titre joliment inspiré ou lourdement pompeux, une mise en page épaisse comme un gruau ou clairette comme un bouillon. Bref, un bouquin parle beaucoup avant d’être lu. Celui causant de Notre-Dame-des-Landes l’est d’autant qu’il constitue un cas d’école totalement contre-intuitif : n’affichant ni titre ni auteur, et donc une totale mutité de façade, son contenu est extrêmement bavard. Sans prix ni maison d’édition, c’est un livre totalement hors les clous, impossible à référencer, un pavé végétal autoédité pesant bon son poids de 563 grammes et alignant sur papier mat ses 367 pages de photos pleine page et d’entretiens écrits serrés.

Décrivons le verdoyant panorama : en couverture, des arbres élancés photographiés à mi-hauteur. Étirée jusqu’à la quatrième de couv’, la photo donne à voir, fixée sur de grosses branches charpentières à plusieurs mètres du sol, une cabane protégée de la pluie par une bâche blanche et bleue. Bien avant la lutte contre l’A69, les « écureuils » de la zad. À l’intérieur, d’autres photos nous attendent : des forêts, des routes, des tags (« Citoyennistes fossoyeurs de luttes » ; « Les sentiers en feu, les stratèges au milieu » qui sera partiellement recouvert et détourné en « Les principes en feu, les puristes au milieu »), des pittoresques bicoques fabriquées avec du matériau de récup, des tours complètement baroques, une chouette, une libellule, des silhouettes lointaines de manifestants ou de flics. Liste non exhaustive. Un genre de naturalisme sans chichi ni romantisme qui colle bien avec le ton sobre et factuel du bouquin. Passé un bref exergue de Chamoiseau invitant à la pluralité des récits (« Toi tu dis l’Histoire, moi je dis les histoires »), une introduction de quatre pages donne quand même quelques billes au lecteur désarçonné : « L’ouvrage que vous tenez entre vos mains n’a pas été conçu à des fins stratégiques. Il ne propose pas – et tant mieux ! – un son de cloche unique. Pas de grandioses “on”, “nous”, la “zad” à l’unisson. Mais les contributions de vingt et une personnes, d’âges variés et issues d’horizon divers, qui ont vécu sur cette zone. »

La faune exotique des schlags

Variée la vingtaine de témoignages ? On atteste. Quelque chose les rapproche pourtant : une commune inimitié avec deux blocs présents sur la zad : les « citoyennistes » d’un côté et les « appellistes » de l’autre. Les « citoyennistes », on le devine, sont ceux qui entendront légaliser leur activité agricole sur la zad, acceptant certains deals avec la préfectance – quitte pour cela à faciliter le travail des casqués lors des ultimes expulsions de 2018. Quant aux « appellistes », décrits comme fan-club pédant et autoritaire du Comité invisible, ils sont accusés « d’instrumentaliser la lutte pour faire avancer leur agenda politique ». « Ils écrivaient des textes, des livres – pour embellir leur mythe de la zad –, et se prenaient pour l’avant-garde de la révolte », estime un interlocuteur du livre. Le jugement est sévère et reviendra sous d’autres formes dans la bouche de plusieurs témoins que l’on pourrait affilier à une troisième sphère de militants venus sur la zad non seulement pour en découdre mais aussi pour vivre un quotidien en rupture totale avec les lois du monde marchand. Un genre d’horizon libertaire, vécu au jour le jour et décliné selon les crédos inclusifs et antiautoritaires du moment.

Une autre ligne de partage des forces en présence est aussi géographique : la D281, la fameuse « route des chicanes » avec ses constructions hétéroclites et poétiques dont la fonction est d’entraver la progression de la cavalerie de l’Intérieur, qui coupe en deux les 1 650 hectares de la zad : d’un côté l’ouest et ses occupants pragmatiques, de l’autre l’est avec ses squatters idéalistes dont il sera principalement question dans ce livre.

Arrivée sur la zad en 2011, Cimex Lex est une gamine un peu zonarde. La mode étant au retournement du stigmate, elle n’hésite pas à se définir comme « shlag » – une clocharde, un parasite – et porte plusieurs coups de canifs à la vision policée et unitaire de la zad. Elle moque le « groupe médiation » déployé sur la zone pour régler à l’amiable les conflits et le réduit à « un putain d’assistant social qui vient faire une sorte de relais entre deux classes, mais qui travaille pour la classe dominante » et elle baffe les leaders « intellos » et leur violence symbolique réduisant les « shlags » à un genre de faune exotique. « Ils fantasment sur nos vies, mais les font disparaître dans leurs livres, et même sur la zad, gardant quelques petits bouts comme des trophées, des vestiges de moments de vie dont ils s’emparent sans y avoir foutu les pieds, sans y avoir rien compris. » Prends ça dans les gencives, parangon d’ultragauche !

À la lecture des différents témoignages du livre, on comprend que la zad, « carrefour des luttes », a été investie d’espérances diverses en fonction de qui débarquait là : du refuge pour marge vagabonde à la base arrière pour minorité agissante sauce blanquiste, en passant par l’aubaine du plan de reconversion agricole pour paysans bios. La force du pari zadiste fut de faire tenir, un temps assez long, tout ce populo ensemble. Reste qu’une fois le projet d’aéroport aux oubliettes, celles et ceux qui voulaient continuer la lutte et occuper les terres pour lesquelles ils s’étaient chèrement battus se sont retrouvés le bec dans la boue du bocage – sentiment de trahison et d’avoir été quelque peu pris pour des pigeons. Cohabitant avec le souvenir ému et enthousiaste des grandes choses accomplies (cabanes et jardins collectifs, lutte contre les casqués, sans oublier la fameuse Radio Klaxon qui eut le chic d’émettre sur les ondes de radio Vinci), une certaine rancœur et une colère froide suintent de certains témoignages. Avouons que, par moments, le lecteur peut se retrouver agacé d’être balancé au milieu d’embrouilles dont il devine difficilement les tenants et les aboutissants, sommé qui plus est de devoir prendre pour argent comptant les accusations lancées contre telle ou telle mouvance. Car si le livre fonctionne comme une compilation relativement homogène de (parfois trop) longs témoignages assumant leur subjectivité, il assume l’économie d’une trame narrative dotée d’un minimum de hauteur de vue qui aurait pu permettre au lecteur de s’y retrouver plus aisément dans la foire d’empoigne des forces en présence. Un choix éditorial qui se défend mais qui pèse sur la lecture de certains récits boursoufflés d’affects et d’exercices autocritiques. Le postmodernisme étant passé par là, il faut non seulement se fader par moments les imbitables tortures syntaxiques de l’orthographe inclusive (les responsables de l’édition ayant fait le choix de respecter, en outre, les modes d’expression de chacun des interviewés) mais aussi certains retours d’expérience où l’obsession consiste à débusquer autant chez soi que chez l’autre tout manque de bienveillance et de sournoise pente autoritaire.

Des personnes ordinaires dans une situation folle

Si nous pouvons nous permettre ces quelques remarques sévères, c’est que, paradoxalement, cette mise en récit d’expériences singulières est une trame universelle d’une exceptionnelle richesse pour comprendre comment se fabriquent les luttes aujourd’hui. Si les Gilets jaunes ont fait couler beaucoup d’encre sur la notion de mouvement « pur » ou « impur », la zad fut, avec son agenda et ses paramètres propres, une séquence tout aussi questionnable sur ce terrain-là. Comment une colère et une énergie communes embarquent des brassées de gens d’horizons divers, les agglomère, les met sous tension, les divise pour à nouveau les souder le temps de ressources mises en commun ou de confrontation avec les milices de l’ordre. L. arrive dans le bocage à l’orée de sa vingtaine, début 2010. Elle vibre pour les questions écolos et cherche à « prendre de la drogue dans les bois ». Plus de dix ans après, elle analyse avec finesse les mécanismes de répression. Car l’État, bien informé des divisions du mouvement contestataire, joue patiemment les uns contre les autres et concentre ses dispositifs répressifs contre tel groupe politique en faisant le pari de son isolement. « La conséquence, estime L., est que le groupe le plus isolé éprouve la violence de la répression en même temps qu’il est abandonné par les autres : un processus qui nourrit l’aigreur et le ressentiment d’un côté, la culpabilité et l’autojustification de l’autre. Quand l’État se déplace vers la prochaine cible, il y a moins de soutien pour les groupes restants à cause de leur dissociation passée. »

Plus loin, elle poursuit : « Quand des personnes parlent de la zad, on entend souvent une sorte de propagande qui implique que tout y était exceptionnel : en fait, nous étions juste des personnes ordinaires dans une situation folle, faisant ce que nous pouvions. (…) Les mythes répandus à propos de l’unité et de l’exception de la zad, ou des combattant.e.s sans peur qui l’ont défendue, créent une perception irréaliste pour d’autres qui voudraient reproduire nos “victoires”. » Dit autrement : l’hagiographie est un révisionnisme qui sape notre capacité à accepter l’idée que tout front de lutte incapable d’assumer et de dépasser ses contradictions internes file droit dans le mur. Une telle dialectique n’est pas simplement théorique, elle est aussi tactique comme l’a très bien compris L. : « C’est aussi en partie pourquoi la zad a réussi à exister pendant si longtemps : avec autant d’éléments si différents agissant tous différemment mais solidairement [nous soulignons] ; c’était compliqué pour l’État d’intervenir. La légitimité sociale des paysan.ne.s qui pouvaient organiser des blocages avec des tracteurs, le savoir pratique de l’expérience du squat et de l’action directe qu’ont amené les anarchistes, combiné avec les délais des procédures légales initiées par les groupes de citoyen.ne.s et l’imprévisibilité des punks de la rue – tout cela combiné pour produire une offensive sans cesse changeante, difficile pour les autorités à vaincre facilement, et à pacifier ou à récupérer. En évoluant vers la fausse unité de la composition, le mouvement est devenu plus unidimensionnel et de ce fait plus facile à attaquer. »

À méditer sans modération.

Sébastien NAVARRO

Notes

[1] Sans autre indication de titre, d’auteur(s) ou d’éditeur, on peut commander ce livre en s’adressant à landes@riseup.net

[2] Voir « Notre-Dame-des-Landes : l’Assemblée des salamandres (CQFD) »

[3] Collectif d’élus doutant de la pertinence de l’aéroport.

9/07/2024 - Commenter (1)

Ésotérique Belgique

Ésotérisme et littérature belge

Revue Textyles, 

Présentation

Ces dernières années, un intérêt croissant pour les questions de spiritualité et d’ésotérisme s’est manifesté dans le milieu culturel et scientifique. À ce jour, on ne compte plus le nombre d’expositions, de publications ou d’événements abordant de près ou de loin ces questions à la croisée d’autres domaines de recherche : l’ésotérisme et la peinture (Esprit es-tu là ? Les peintres et les voix de l’au-delà au Musée Maillot à Paris, 2020), l’ésotérisme et la magie au féminin (Witches : histoire de sorcières, Espace Vanderborght/ULB, Bruxelles, 2021-2022), l’ésotérisme et la science (Phénomènes. L’inexpliqué face à la science, Musée d’Histoire de la Médecine de Paris, 2022-2023) ou plus largement les savoirs cachés (expositions annuelles de la Bibliothèque Saint-Geneviève de Paris sur les « Savoirs cachés »), pour ne citer que quelques exemples. Le sujet passionne autant qu’il questionne, comme en témoignent la récente enquête lancée par le journal Le Monde en décembre dernier (« Les fantômes ne font plus peur aux chercheurs ») ainsi que le numéro spécial de L’Express sorti en août 2023 « L’Ésotérisme, un essor inquiétant ». Si étymologiquement, l’ésotérisme ou l’occultisme – son faux jumeau –, renvoient à un ensemble de savoirs cachés qui ne se transmettent qu’à quelques initié·e·s, force est de constater que le terme s’est aujourd’hui popularisé pour désigner un ensemble flou de savoirs déviants (chiromancie, astrologie, angélologie, radiesthésie, etc.) et de courants marginaux (gnose, kabbale, hermétisme, spiritualisme, théosophie, etc.).

Or, si le sujet capte aujourd’hui l’intérêt médiatique et pique la curiosité des chercheurs et chercheuses, on rappellera que c’est à partir des années 1990 que l’ésotérisme s’est institué comme champ de recherche académique, notamment grâce aux travaux de l’historien Antoine Faivre, avec son célèbre Accès à l’ésotérisme occidental (1986). Au sein de ce domaine d’étude, deux perspectives s’affrontent : une démarche syncrétique qui considère l’ésotérisme comme un ensemble de savoirs hétéroclites qui ont traversé les siècles et une démarche plus historique, défendue par Faivre, qui étudie des courants spécifiques dans leurs contextes et leur confère des caractéristiques propres. Nous nous proposons de privilégier cette dernière approche en considérant, à l’instar de Faivre, l’ésotérisme comme une constellation de courants spirituels qui affichent entre eux une parenté et, préciserons-nous dans le cadre du présent dossier, un rapport étroit avec la pratique littéraire.

En effet, il faut souligner que les recherches littéraires ont révélé une curiosité précoce à l’égard de ce vaste champ d’études, bien avant l’intérêt des historiens. On peut remonter à la thèse d’Auguste Viatte, Les Sources occultes du Romantisme, publiée en 1928 ou encore celle d’Alain Mercier, Les Sources ésotériques et occultes de la poésie symboliste (1969). Si l’intérêt des spécialistes de la littérature s’est dans un premier temps concentré sur l’ésotérisme au sens large et son incidence sur le romantisme et le symbolisme, on observe un tournant dans la recherche contemporaine qui s’intéresse plus spécifiquement aux « savoirs magnéto-spirites », tels que les nomme l’historien de la littérature Michel Pierssens, c’est-à-dire issus du magnétisme et du spiritisme, interrogés dans leurs liens avec le champ littéraire. Outre ces travaux axés sur l’épistémologie en littérature, citons également le livre de Daniel Sangsue, Fantômes, esprits et autres morts-vivants. Essai de pneumatologie littéraire (2011) qui propose un panorama critique de la science des spectres dans la littérature du XIXe siècle. Depuis, d’autres travaux académiques se consacrèrent entièrement à cette question, dont la thèse de Patrizia d’Andrea, Littérature et spiritisme au tournant du siècle (1865-1913) (2014), qui propose une analyse stylistique et littéraire de ces textes dans le sillage des travaux de Jean de Palacio pour la période décadente. Outre ces études formelles et discursives, d’autres champs d’investigation ont également intéressé la recherche contemporaine : dans la continuité de la recherche anglo-saxonne, très en avance sur ces sujets, les travaux se sont petit à petit orientés vers la portée politique de ces courants et plus particulièrement sur les questions de genre et d’auctorialité en littérature. On peut citer dans cette perspective les travaux de l’américaine Claudie Massicotte, comme Trance Speakers: Femininity and Authorship in Spiritual Séances, 1850-1930 (2017) notamment ou encore l’ouvrage d’Elizabeth Schleber Lowry, Invisible Hosts : Performing the Nineteenth-Century Spirit Medium’s Autobiography (2017). Pour la littérature française, on peut mentionner l’article de Patrizia d’Andrea « Féminisme et spiritisme. La littérature de propagande en France au tournant du siècle » ou encore celui de Laurence Brogniez « Bas-bleus et draps blancs : femmes et littérature spirite (1865-1914) » publié dans l’ouvrage collectif, La Littérature en bas-bleus (2017). L’intersection entre littérature et ésotérisme s’avère donc être une voie de recherche particulièrement féconde, principalement pour le champ littéraire français, comme le confirment nombre d’articles du dernier numéro des Cahiers de l’Herne consacrés aux Mondes invisibles (2023), autre témoignage d’un intérêt qui ne faiblit pas.

Nous souhaiterions dans ce dossier questionner la place de la littérature belge au sein de ces abondantes recherches, du XIXe siècle jusqu’à nos jours. Car si l’influence de l’ésotérisme sur l’art belge a été déjà étudiée, notamment grâce à la thèse en Histoire de l’art de Sébastien Clerbois, L’Ésotérisme et le symbolisme belge, ou encore par les recherches menées par Charlotte Foucher Zarmanian sur le symbolisme fin de siècle, l’incidence de tels courants sur la littérature belge demeure encore aujourd’hui un angle mort de la recherche. Alain Mercier, qui y consacre quelques pages dans le deuxième tome de son livre Les Sources ésotériques et occultes de la poésie symboliste (1969), et Paul Gorceix, dans son livre sur Maurice Maeterlinck, du mysticisme à la pensée ésotérique (2006), semblent les seuls à faire place à ce champ d’étude. L’objectif de ce présent numéro est donc de combler cette lacune en étudiant les liens entre les savoirs ésotériques – au sens large précisé plus haut – et la création littéraire en Belgique. De plus, par leur caractère marginal, ces savoirs ne sont pas toujours officiellement revendiqués, mais apparaissent en filigrane au détour d’une correspondance ou dans les papiers personnels des écrivain.e.s. À cet effet, on notera qu’il existe plusieurs fonds aux Archives et Musée de la littérature (AML) qui peuvent être consultés avec profit. Lire la suite »

5/04/2024 - Commenter

Les âmes à la Chèvre

La Chèvre

Salon d’éditions livresques et musicales

revient du 22 au 24 avril 2022 !

Au programme, comme d’habitude, des stands hétéroclites d’éditeurices indépendantEs de bouquins, de brochures, de fanzines.

Vous y trouverez aussi des labels de l’ombre, aux productions plus ou moins bruitistes.

Mais zaussi des présentations de bouquins, suivies de débats/ discussions / échanges.

Mais itou des ateliers créatifs, des écoutes radiophoniques, des expos / rétrospectives, des concerts loufoques, baroques et bruyants.

Sans oublier du miam miam, du glou glou, du bla bla, du ha ha et du grr grr.

De la vie, quoi, du bordel…

Des questions? Des remarques? Des insultes? Ecris à lachevre@azqs.com !

7/04/2022 - Commenter

Poet·e·ss·e·s. Qu’est-ce qu’une femme poète ?

 Poet·e·ss·e·s

Qu’est-ce qu’une femme* poète ? Histoire, création, politique. »

11, 12 et 13 mai 2020

à l’École Normale Supérieure (de Paris), à l’Université Paris 8 et à l’Université Paris 3

 

Le mot poétesse, apparu au XVIe siècle, s’est chargé au fil du temps de connotations péjoratives. Délaissée au XVIIe pour la forme masculine, cette dérivation de poète réapparaît notamment au XIXe siècle, dans le contexte d’une multiplication des œuvres écrites par des femmes, afin de les différencier des productions poétiques sérieuses. Nombre de créatrices ont alors rejeté ce terme devenu marginalisant. Cette histoire contrastée explique en partie la persistance, aujourd’hui encore, d’un flottement terminologique. Là où l’expression anglaise woman poet fait consensus, on parle en espagnol de (mujer) poeta autant que de poetisa et, en français, tantôt d’une poétesse, d’un poète (au masculin), d’une poète (au féminin), d’une femme-poète ou encore d’une poète-femme.

L’indétermination quant à la désignation est symptomatique du rejet qu’ont souvent inspiré celles qui, en tant que minorité, ont sans cesse été renvoyées à leur altérité. Dans les ouvrages généralistes, la production poétique des femmes est bien souvent réduite à quelques noms jalonnant les siècles de l’histoire littéraire : Sappho, Marie de France, Louise Labé, Sor Juana Inés de la Cruz, Marceline Desbordes-Valmore, Emily Dickinson, Gertrude Stein, etc. Cette invisibilisation a été notamment mise en lumière par les travaux de la critique littéraire féministe, qui a pointé du doigt ce qu’Hélène Cixous, en France, a nommé « le refoulement de la femme ». Ces travaux ont permis à de nouvelles voix de porter dans ces cinquante dernières années. Pourtant, le problème demeure : Liliane Giraudon, en 1994, réitère ce constat dans la préface de son anthologie Poésie en France depuis 1960, 29 femmes ; et le volume de l’anthologie poétique parue en 2000 chez Gallimard consacrée au XXe siècle ne comprend que 15 femmes pour 173 hommes, pour ne donner que deux exemples. Aujourd’hui encore, les femmes qui écrivent de la poésie sont nombreuses, mais la plupart du temps mal visibilisées par les milieux éditoriaux et les médias.

La poésie se lit moins que le roman, certes, mais le cas de femmes poètes devenues célèbres sur les réseaux sociaux – Rupi Kaur, Orion Carloto, Najwa Zebian – et, récemment, l’étude de Jan Clausen en introduction à l’anthologie poétique Je transporte des explosifs, montrent qu’un public fidèle existe et est en attente de productions poétiques de femmes. Il demeure que beaucoup doivent encore inventer leur propre chemin vers une certaine reconnaissance. C’est là le prolongement d’une longue histoire de détours et de stratégies : songeons par exemple à tous les poèmes publiés anonymement dans des recueils collectifs, par les Précieuses du XVIIe siècle, et aux pseudonymes masculins adoptés par les écrivaines, notamment au XIXe siècle, de Fernán Caballero à Gérard d’Houville. Si ces démarches sont plus largement celles des femmes de lettres, la poésie, longtemps considérée comme le plus exigeant des genres littéraires, a cristallisé de manière exacerbée un dispositif d’exclusion dont les créatrices du XXIe siècle sont encore tributaires.

Dans le cadre universitaire français, malgré l’augmentation du nombre de travaux sur les femmes poètes, due notamment à l’essor des études de genre, la recherche peine à rendre à leur production sa juste place, alors même qu’elle est déjà très développée en Amérique du nord. Ce colloque universitaire de trois jours a pour finalité d’attirer l’attention sur ce retard, en rassemblant les entreprises de recherche existantes autour d’un panorama international et transséculaire. Son intitulé, très large, permettra de favoriser une approche pluridisciplinaire, au croisement de la sociologie, de l’histoire, des études de genre et de la littérature. Cet événement n’a naturellement pas pour finalité une quelconque exhaustivité ; il est plutôt animé par le désir de proposer des « états généraux » de la poésie écrite par des femmes, afin de remettre le sujet sur le devant de la scène et, nous l’espérons, de donner naissance à des projets futurs.

De même qu’elle rejette la notion d’« essence féminine », notre démarche voudra rendre compte, notamment, de la caducité de la notion de « poésie féminine ». Celle-là, en effet, réunit artificiellement des pratiques hétéroclites sous couvert de leur « altérité » dans un référentiel pensé et défini comme exclusivement masculin. Nous explorerons au contraire la diversité de la production poétique de femmes de zones géographiques, de cultures et de langues diverses et qui toutes, se situent à l’intersection d’identités multiples (raciales, sexuelles, culturelles). Cette attention portée à la variété des textes poétiques et de leurs autrices sera l’occasion de réaffirmer la porosité d’un genre aujourd’hui plus que jamais protéiforme.

*

Les propositions de communication pourront suivre les axes de recherche suivants :

Le genre poétique en question : Comment s’approprier un langage poétique originellement pensé par et pour les hommes ? Comment la production poétique des femmes est-elle parvenue à se détacher de l’autorité des créations masculines ? Quelles spécificités dans la réappropriation du genre poétique ? Quelles résistances spécifiques au genre ?

Stratégies d’écriture et de publication : Quelles contraintes symboliques, financières, matérielles pour atteindre à l’écriture poétique ? Quelles variations historiques et géographiques dans les stratégies d’écriture et de publication ?

Questions de convergences : Quelle place accordée aux pratiques poétiques non européennes et/ou non blanches dans le cadre européen ? Quelles spécificités intersectionnelles ? Comment la question du genre (gender) s’articule-t-elle à celles de l’identité raciale, culturelle, sexuelle dans la construction de l’autorité de la voix poétique ?

Le genre (gender) du poème : Quel genre grammatical adopter en tant que femme poète ? Quelles tentatives pour féminiser la langue poétique ? Comment traduire en français des écrits qui, dans leur langue source, sont au genre neutre ? Quelles transformations, quelles résistances et réalisations pour une poésie neutre/queer ? Quelle place pour les identités queer en poésie ?

Évolutions et variations : Quel rôle des femmes poètes dans l’histoire littéraire générale ? Quelle place dans la presse et les anthologies mixtes ? Quelle diversité des situations pour les femmes poètes, selon la zone culturelle et la période historique ? Quelles époques propices à l’émergence de voix poétiques féminines ?

Questions de réception : Quelles réceptions pour les femmes poètes au fil du temps ? Qui lit les femmes poètes ? Pour qui écrivent-elles, selon les époques et les zones géographiques ?

                                                                      ***

Le colloque aura lieu les 11, 12 et 13 mai 2020, respectivement à l’École Normale Supérieure (de Paris), à l’Université Paris 8 et à l’Université Paris 3. Le colloque universitaire s’intégrera dans une programmation culturelle plus large qui, durant quelques jours, réunira poètes, traducteur·rice·s, éditeur·rice·s, libraires et chercheur·euse·s autour de tables rondes, lectures, performances, ateliers d’écriture et de traduction, dans des lieux universitaires et culturels, afin de faire entendre les voix des poéte·ss·e·s d’hier et d’aujourd’hui. Une publication des actes du colloque est prévue. Les propositions de communication devront s’étendre à 350 mots au maximum et sont à envoyer, accompagnées d’une bio-bibliographie d’environ 3 lignes, avant le 30 janvier 2020 à l’adresse suivante : colloquefemmespoetes@gmail.com.

*

Comité scientifique :

Nathalie Koble (ENS), Martine Créac’h (Paris 8), Abigail Lang (Paris 7),

Vincent Broqua (Paris 8), Laure Michel (Paris 4), Françoise Simasotchi-Brones (Paris 8).

Comité d’organisation :

Lénaïg Cariou (Paris 8), Camille Islert (Paris 3), Zsofia Szatmari (Paris 8–ELTE), Elvina Le Poul (Paris 8), Marie Frisson (Paris 3-ENS), Claire Finch (Paris 8), Nessrine Naccach (Paris 3), Khadija Benfarah (Paris 4), Solène Méhat (Paris 8), Lucile Dumont (EHESS), Mathilde Leïchlé (EPHE).

Contact : lenaig.cariou@ens.fr ; camille-islert@club-internet.fr ; zsofszatmari@gmail.com

7/01/2020 - Commenter

Le Désarroi

Le Mercure de France réédite, après Sixtine, Le Désarroi de Remy de Gourmont. Ce roman dit anarchiste, longtemps inédit, qui a été publié pour la première fois en 2006 par Nicolas Malais aux éditions du Clown Lyrique, eut un avant-texte symboliste, Le Destructeur, dont plusieurs chapitres parurent dans Le Journal et dans quelques autres périodiques entre 1894 et 1896. D’après Mikaël Lugan, qui a contribué avec Christian Buat à la parution de ce texte en 2009 aux Âmes d’Atala (à la suite d’Histoires hétéroclites, recueil de texte aujourd’hui épuisé), Gourmont, qui avait dispersé partie de la matière romanesque dans son recueil de contes D’un pays lointain, remania et recomposa son manuscrit à la fin du XIX e siècle pour en faire Le Désarroi, où s’entremêlent occultisme et anarchisme.

 

Bref, Le Désarroi…

 

Pour se reprendre et se rejeter dans la nuit, Salèze recula vers le passé, courut après ses amours mortes et, les ayant saisies à la gorge, il les maintenait sous son regard, à genoux devant lui, les yeux pâles et la bouche tremblante : il se donnait le pouvoir d’arrêter les larves et de surprendre leur fuite vers le fleuve de sable dont elles sont les nymphes.

À la toute fin du XIXe siècle, dans un Paris secret, se préparent de sanglantes exactions anarchistes. Salèze, grand cérébral, financier occulte d’attentats, destructeur de valeurs morales et religieuses, manie la métaphore avec éclat – entre Blake, Dante et Maldoror – pour tenter d’attirer dans son monde extraordinaire et nihiliste la belle mais rétive Élise. Ésotérisme, anarchisme, paradis artificiels : tous les moyens semblent bons aux personnages du Désarroi pour «se délivrer de la chaîne des causes». Mais viendra l’heure des choix ou de la catastrophe annoncée…

3/08/2018 - Commenter

Pour info, Clothilde a participé aux âmes, il y a sept ans maintenant, pour la couverture des Histoires hétéroclites de Remy de Gourmont…

18/04/2017 - Commenter

Le défi libertaire (ah ah !)

Le défi libertaire

Colloque international et pluridisciplinaire à la FLSH de Limoges, du 24 au 25 novembre 2016

L’ambivalence de la notion de liberté est un enjeu majeur de toute pensée thématisant le rapport entre individu et collectivité, entre autonomie régionale et pouvoir central, entre action individuelle et dogme.  Dans l’histoire des idées, c’est la pensée libertaire qui cherche à faire valoir l’individu dans son autonomie. Elle s’inscrit autant dans la philosophie politique que dans les domaines des arts et des lettres, soit sous forme d’une revendication, soit dans le but concret de réaliser des visions utopiques à travers de projets concrets  – comme la création de communautés autonomes et d’ateliers d’artistes ou des actions écologique et altermondialistes.  Souvent identifie – tantôt pour des bonnes raisons, tantôt à tort –   à l’anarchiste, le libertaire peut aussi être considéré comme l’héritier d’un certain libéralisme radical aujourd’hui mis à mal dans nos « démocraties modernes ».

En effet, le défi libertaire reste pertinent  – dans un monde où la sécurité et l’économie priment sur individu et son intégrité, où les derniers représentants du libéralisme politique se résignent,  où la « République des algorithmes » avec son système d’évaluations transforme les sociétés, où l’habeas corpus finit par se transformer en corpus habent.

L’accent du colloque sera mis sur la question de l’autonomie de l’individu ou des collectifs humains à travers l’histoire des idées ainsi que sur ses représentations. Un autre centre d’intérêt sera l’impact d’une attitude libertaire dans les arts (mail art, street  art, graffitis…) et dans l’action politique (guerilla gardening, flash mob, squatting…).  Pour certaines pistes à explorer, veuillez consulter l’argumentaire plus détaillé  que vous trouverez en annexe.

Le colloque s’adresse à toutes les disciplines du domaine des lettres et des sciences humaines. Le comité scientifique prêtera pourtant une attention spéciale aux propositions axées sur l’approfondissement théorique de la notion de « libertaire ».

Organisation                                                             Directeurs :

EHIC (EA 1087)                                      Till Kuhnle, Philippe Colin, Luis Fe-Canto

Comité scientifique:

Ioan Pop-Curşeu (Université Babeş-Bolyai, Cluj-Napoca), Henning Krauß (Augsbourg),, Robert Reimer (University of North Caorlina, Charlotte), Jean-Marie Grassin (Limoges), Betrand Westphal (Limoges), Christine de Buzon (Limoges) et les organisateurs du colloque.

Agenda :

Le colloque aura lieu du 24 au 25 novembre 2016 à la FLSH de l’Université de Limoges. Les propositions (titre  provisoire,  résumé,  laboratoire de rattachement, CV succinct) seront à adresser aux trois organisateurs  avant le 20 juillet 2016 ;  le comité scientifique se réunira le 30 juillet 2016.  Comme nous envisageons une sortie rapide des actes, nous avons fixé le 20 décembre 2016 comme date butoir pour la soumission des articles qui seront soumis à un comité de lecture.

Annexe

Le défi libertaire – argumentaire 

L’ambivalence de la notion de liberté est un enjeu majeur de toute pensée thématisant le rapport entre individu et collectivité, entre autonomie régionale et pouvoir central, entre action individuelle et dogme… Chez Rousseau, la volonté générale primait la volonté individuelle – et ainsi la liberté de la nation celle des individus. La Révolution adopta pour devise la formule trinitaire de « liberté, égalité et fraternité » préconisant ainsi un concept de liberté qui soumet la liberté individuelle aux impératifs éthiques exprimés à travers les deux autres concepts de cette formule. La pensée des Lumières en Allemagne en revanche mettait l’accent sur l’action individuelle en postulant l’impératif catégorique (Kant) ou en déclarant que l’État est fait pour les hommes et non pas les hommes pour l’État  (Lessing) ; dans la littérature du Sturm und Drang, ce fut le culte de l’individu insoumis (Goethe : Götz de Berlchingen, Schiller : Les Brigands) dont allaient s’emplir maints auteurs de la Jeune Allemagne.

Pour le libéralisme anglais, l’État doit protéger notamment la liberté des entrepreneurs. Raillé par Marx et Engels, Max Stirner défendait même la liberté totale de l’individu.  Malgré sa vision de l’homme égoïste, ce « jeune hégélien » a pourtant fourni un instrument de réflexion permettant de scruter le fond idéologique de tout discours tenu sur la liberté.  En 1857, dans une lettre adressée à Pierre Proudhon, Joseph Déjacque,  opposa le « libertaire » au « libéral » pour dénoncer les déboires du capitalisme. Dorénavant, le terme « libertaire » sera souvent associé à l’anarchisme. Dans les années 80, un jeune sociologue français, Jean-Marie Guyau, qui attira l’attention de Nietzsche avec son Esquisse d’une morale sans obligation ni sanction et son étude sociologique L’Irréligion de l’avenir, pose les fondements d’une éthique libertaire.

Dans son essai La Morale anarchiste (1889), Pierre Kropotkine cherchait à dépasser l’impératif kantien : « Le bonheur de chacun est intimement lié au bonheur de tous ceux qui l’entourent ». Seul une société respectant ce principe saurait parer les instincts destructeurs. Cela va à l’encontre a ce nihilisme qui, s’appuyant souvent sur une lecture erronée de Nietzsche, se repend dans toute l’Europe. Un courant plus doctrinaire, en revanche, naquit avec l’anarcho-syndicalisme de Georges Sorel, auteur des Réflexions sur la violence – livre prisé par les futuristes et par Mussolini. En France, par ailleurs, on continue à parler d’un « anarchisme de droite » qui est situé dans les sillons d’auteurs comme Céline. Reste à noter qu’aux États-Unis, un autre courant de droite qui revendique une sorte d’anarcho-capitalisme est appelé «les  libertarians ».

En Allemagne, les auteurs libertaires et anarchistes jouaient un rôle particulièrement important dans les mouvements révolutionnaires à la fin de la Première Guerre mondiale. En outre, Michael Löwy constate depuis cette époque l’influence croissante d’un judaïsme libertaire sur la pensée critique. Celui-ci repose sur une interprétation du messianisme selon laquelle la rédemption dont nécessairement se produire dans l’Histoire (Sholem, Benjamin, Buber).

Dans le domaine hispano-américain les idéaux libertaires ou anarchistes ont eu une influence durable. Le dynamisme violent des protestations agraires andalouses, l’action directe, l’anticléricalisme, le poids mythique d’organisations anarchistes telles que la « Mano Negra » ou le rôle clé du syndicat anarchiste CNT dans l’organisation de la lutte ouvrière dans les villes espagnoles firent de l’Espagne une terre de choix pour les anarchistes européens dans les premières décennies du XXe siècle. L’Espagne put même devenir la terre de l’utopie anarchiste pendant les premiers mois de la Guerre Civile espagnole. Ce désir d’utopie traversa aussi l’Atlantique pour prendre racine dans les terres américaines. Il y laissa une empreinte durable faite des parcours littéraires et politiques très visibles dans les premières décennies du XXe siècle. Dans ce contexte, par ailleurs, il ne faut pas oublier la littérature anti-belliciste dans le cadre colonial (par exemple les guerres pour le contrôle du Rif marocain entre 1909 et 1927). C’est cette idée de parcours et de présence des figures anarchistes dans la société et littérature hispanique qui constitue le fil rouge entre le passé et le renouveau des idéaux anarchistes ces dernières années.

La « greffe » libertaire fut d’autant plus vigoureuse en Amérique Latine (et tout particulièrement dans le cône sud) qu’une certaine tradition de défiance voire même de rupture face aux structures impériales puis républicaines s’était installée parmi les
populations métisses, noires et indigènes. Ainsi, à la fin du XIXe siècle le genre littéraire « gauchesque » constitua-t-il, en Argentine, une célébration nostalgique du mode de vie et des formes d’expression culturelles libertaires des gauchos. Au cours de la même période, l’arrivée massive d’immigrés européen en quête d’une vie meilleure dans le Nouveau Monde déboucha sur l’émergence d’un puissant mouvement ouvrier anarcho-syndicale radicalement anti-politique. Mais l’idéologie libertaire ne fut seulement l’apanage des masses ouvrières paupérisées et désenchantées : dès la fin du XIXe siècle son influence s’étendit à une fraction importante de l’intelligentsia littéraire en Argentine et dans d’autres pays d’Amérique Latine. Même si l’anarchisme, qui a connu un brutal déclin à partir des années 30, ne constitue plus aujourd’hui une force politique et idéologique significative en Amérique Latine, il peut être tentant de le rapprocher de certains courants indianistes contemporains – on pense tout particulièrement au mouvement néo-zapatiste dans l’état du Chiapas au Mexique.

Après la Deuxième Guerre mondiale, l’esprit libertaire animait les contestataires des années 68 revendiquant « l’imagination au pouvoir » ainsi que les mouvements écologiques et pacifistes. Mais c’est avant tout dans le domaine des arts qu’il reçut un nouveau souffle avec des courants comme Fluxus ou les situationnistes (Guy Debord, Vaneigem).

Maints penseurs nord-américains, à l’instar de Marcuse ou Chomsky, s’inscrivent alors dans cet élan libertaire.  En retour, les courants libertaires nord-américains, nourris de sources hétéroclites comme le transcendantalisme de Thoreau ou d’Emerson du XIXe siècle, le mouvement contestataire autour du procès de Sacco et Vanzetti dans les années 1920, le African-American Civil Rights Movement,  jusqu’au mouvement pacifiste de la contre-culture en passant par la beat generation (Kerouac, Ginsburg et comparses), vont durablement influencer la pensée émancipatrice européenne.

Pour la pertinence de cette manière de penser, on peut citer maints exemples comme la renaissance d’un Camus « libertaire » ou le travail des caricaturistes de Charlie Hebdo, sans pour autant oublier les whistleblowers (lanceurs d’alerte). En effet, le défi libertaire continue – dans un monde où la sécurité et l’économie priment sur l’individu et son intégrité, où le néolibéralisme finit par effacer toute distinction entre gouvernants et gouvernés, où les derniers représentants d’un libéralisme politique se résignent,  où la « République des algorithmes » avec son système d’évaluations transforme les sociétés, où l’habeas corpus finit par se transformer en corpus habent.

L’accent du colloque sera mis sur la question de l’autonomie de l’individu ou des collectifs humains à travers le contexte historique esquissé ci-dessus et la philosophie politique ainsi que sur sa représentation en littérature et au cinéma. Un autre centre d’intérêt sera l’impact d’une attitude libertaire dans les arts (mail art, street  art, graffitis…) et dans l’action politique (guerilla gardening, flash mob, squatting…). D’ailleurs, ancien fief de la Résistance, le Limousin peut être considéré comme une terre d’accueil privilégiée pour les communautés d’artistes et des différents groupes d’inspiration libertaire.

4/07/2016 - Commenter

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