A paraître chez Verticales
« Les défunts existent deux fois, la première de leur vivant, la seconde de ce qu’ils agitent en vous ; il est perpétuellement question d’eux. »
Ultime chambre d’échos d’un hôpital, ce roman donne à entendre les voix d’un groupe de patients qui, atteints d’une incurable tumeur au cerveau, ont encore beaucoup de choses à exprimer, entre éclairs de lucidité, affabulations drolatiques et hantises familières. En alternance avec cette matière sensible et souvent poétique, l’auteure inclut aussi les proches, plongés des mois durant dans cette même aventure intérieure, avant d’affronter l’épreuve du deuil. Ainsi imbriquées, toutes ces bribes portent paradoxalement des moments de répit et les derniers ressorts d’un élan vital.
« Je ne peux pas m’empêcher d’imaginer Ana à Saint-Pétersbourg. Elle avance dans une rue glaciale, sa peau est retournée, mais le froid passe à côté, parce que toute son attention est à l’intérieur. Ana cherche à comprendre Gor, Ana veut devenir Gor. »
La narratrice de ce roman, enquêtant sur un poète russe méconnu, Guennadi Gor — auteur du recueil Blocus lors du siège de Leningrad —, s’aperçoit qu’Ana, une étudiante portugaise qui s’était passionnée dix ans auparavant pour le même poète, a disparu aux confins de la Biélorussie, non sans laisser à son tour des carnets intimes. Revenant sur les pas de ces écrits successifs, elle s’imprègne peu à peu de leurs destins, où résonne plus d’un demi-siècle d’histoire européenne, pour tracer sa propre ligne de fuite.
“On a voulu faire en sorte que chaque tarte ait un sens”, déclarait Stan Laurel à propos de La Bataille du siècle (1927), la plus longue bataille de tartes à la crème de l’histoire du cinéma muet. Prenant cette déclaration très littéralement, Pierre Senges suppose la présence de « significateurs de tartes » sur les plateaux de tournage, tout en nous contant les secrets de la Los Angeles Cream Pie Company, chargée de fournir ces projectiles pâtissiers aux studios de Hollywood. Ce livre émet encore bien d’autres hypothèses gourmandes, voire théologiques. Et si l’auteur prête à cet entartage une certaine gravité, c’est celle d’un « pitre sérieux » conjurant par le rire le non-sens universel.
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30/11/2019