Teleny
Mon désir augmenta d’intensité, le besoin de le satisfaire devint une souffrance, et le feu allumé en moi, une flamme qui me dévorait ; mon corps entier convulsa en une rage érotique. J’avais les lèvres sèches, la respiration haletante, les membres raides, les veines enflées, et néanmoins, je me tenais impassible comme ceux qui m’entouraient. Soudain, il me sembla qu’une main invisible glissait sur mes genoux ; quelque chose de moi fut touché, saisi, étreint ; une indicible volupté emplit tout mon être. La main montait et descendait d’abord lentement, puis de plus en plus vite suivant le rythme du chant. Le vertige s’empara de mon cerveau, une lave brûlante courut dans mes veines, quelques gouttes jaillirent… Je palpitai.
Peut-on appeler concupiscence ce feu inextinguible qui nous consumait ? Nous ressemblions à l’animal affamé qui trouve enfin une ample pâture, et tandis que nous nous embrassions avec une avidité toujours croissante, mes doigts caressaient les boucles de ses cheveux et la peau douce de son cou. Nos jambes s’enlaçaient, son phallus en érection se frottait contre le mien non moins raide et non moins dur. Etroitement collés l’un à l’autre de façon à mettre tout notre corps dans le plus étroit contact, haletants et agités de violentes secousses, nous couvrant de baisers et de morsures, nous devions ressembler, sur ce pont, au milieu de l’épais brouillard, à deux damnés en proie aux tourments éternels.
Pendant que nos bouches se collaient l’une sur l’autre, sa main lentement, imperceptiblement, déboutonnait mon pantalon, se glissait dans l’ouverture, écartait la chemise, s’emparait de mon phallus raide et brûlant. Douce comme la main d’un enfant, experte comme celle d’une courtisane, ferme comme celle d’un maître d’escrime, elle me fit me souvenir, à son simple contact, des paroles de la comtesse.
Nous savons tous qu’il existe des gens plus ou moins magnétiques. Les uns vous attirent, d’autres vous repoussent. Teleny possédait, pour moi du moins, une sorte de fluide mesmérique dans les doigts. Son simple contact me faisait me pâmer. Ma main suivit un peu hésitante l’exemple de la sienne, et je dois confesser que le plaisir que j’éprouvais à manier sa verge était délicieux. A peine nos doigts effleurèrent-ils nos pénis, que dans la tension excessive de nos nerfs et le degré de notre excitation, l’engorgement de nos conduits séminaux les fit déborder. Pendant un moment, une violente douleur me saisit vers la racine de la verge, ou plutôt à l’intérieur des reins, après quoi la sève de vie commença à couler lentement, lentement des glandes séminales ; elle monta au bulbe de l’urètre, le long de l’étroite colonne, comme du mercure dans le tube du thermomètre, ou de la lave en fusion dans le cratère d’un volcan. Elle atteignit le sommet, la fente s’ouvrit, les petites lèvres se séparèrent, et la crème visqueuse jaillit, non pas en un jet violent, mais par saccades, en grosses larmes brûlantes. A chaque goutte qui s’échappait, une sensation indescriptible, insoutenable, se produisait au bout des doigts, à l’extrémité des pieds, dans les plus profondes cellules de mon cerveau ; la moelle de l’épine dorsale, celle des os semblaient se liquéfier ; et lorsque ces différents courants, ceux du sang et ceux des fibres nerveuses, se rencontrèrent dans le phallus, instrument de muscles et d’artères, un terrible choc se produisit, une convulsion annihilant à la fois l’esprit et la matière – jouissance que chacun a ressentie plus ou moins violente, si violente que quelquefois qu’elle cesse d’être un plaisir. Serrés l’un contre l’autre, tout ce que nous pouvions faire était d’essayer d’étouffer nos soupirs pendant que les gouttes spermatiques s’échappaient.
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28/07/2018