Hors la loi
Appel à contributions pour un séminaire de doctorants
Séminaire de doctorants : « Hors la loi », Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, 2018/2019
Comité d’organisation : Antoine Ducoux, Guillermo Héctor, Matilde Manara, Ivan Salinas (CERC)
Modalités d’organisation
- Le séminaire de doctorants “Hors la loi” est organisé par les doctorant.e.s de l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, membres de l’Ecole Doctorale 120 “Littérature française et comparée” et de la revue de littérature générale et comparée TRANS-. (https://journals.openedition.org/trans/).
- Les séances du séminaire auront chaque mois, à partir du 5 novembre 2018, le lundi, de 17h à 19h, sur l’un des sites de l’Université Paris 3. (dates à déterminer, selon disponibilités des intervenant.e.s).
- Toutes les séances seront ouvertes au public dans la limite des places disponibles.
- Les propositions d’intervention pourront être envoyées aux adresses suivantes : antoine.ducoux@sorbonne-nouvelle.fr ou guillermo.hector@sorbonne-nouvelle.fr, accompagnées d’une brève présentation du sujet de thèse et des disponibilités de l’intervenant.e. Merci de nous faire parvenir vos propositions avant le 1er septembre si vous souhaitez intervenir au 1er semestre, et le 1er novembre si vous souhaitez intervenir au second semestre.
- Les interventions feront l’objet d’une publication sur la revue en ligne TRANS-.
Argumentaire
Soit le propos suivant de Roberto Bolaño : « Je persiste à croire que pour écrire, il faut se placer dans la position que prônait Villon, le poète médiéval français, c’est-à-dire hors la loi. On écrit en dehors de la loi. Toujours. On écrit contre la loi. On n’écrit pas selon la loi1. » Que la conviction de Bolaño prenne ici la forme d’une prescription (« il faut ») ou d’un postulat (« toujours »), cela n’est pas le moindre paradoxe de sa conception exigeante de la littérature. Libertaire et dissidente, la position défendue par Bolaño fait de la loi un donné, dont le discours littéraire s’extrait et se distingue tout en s’opposant à lui. Lieu problématique d’une exclusion, mais aussi d’un examen critique de la loi, l’écriture « hors la loi » entre avec celle-ci dans un rapport dialectique que nous souhaitons interroger plus précisément.
Cette réflexion initiale nous invite donc à questionner la pluralité des modes de relation entre la littérature et les systèmes de normes mettant en jeu l’autorité symbolique de la loi. Au-delà des résonances libertaires ou criminelles qu’elle emprunte généralement dans le jeu des discours et des représentations, l’expression « hors la loi » sera donc envisagée du point de vue des pratiques artistiques et des positionnements impliqués par celles-ci, mais aussi du point de vue des médiations que la littérature et les arts proposent du domaine « hors la loi ».
Nous commencerons donc par envisager cette catégorie comme un fait de discours. Plus qu’à la « représentation du crime » ou des criminels, on s’intéressera à la façon dont des individus, des attitudes et des « formes de vie », exclus du contrat social et des systèmes de significations officiels, s’y voient réintégrés sous le signe de la déviance ou de la délinquance. Les expressions de l’illégalité renvoient à des modes d’existence juridiquement, politiquement, et historiquement déterminés par le discours. Or ces expressions, susceptibles d’être actualisées, réappropriées par les groupes concernés, peuvent varier selon leur objet et leur lieu d’énonciation. Elles se trouvent alors saturées de significations configurant un imaginaire complexe, qui trouble toute assignation morale ou juridique des individus.
Au-delà des représentations et des modes de figuration proposés par le courant historiographique de « l’Histoire d’en bas », la sociologie, la géographie ou encore l’anthropologie culturelle, la littérature et les arts proposent ainsi, via le jeu des représentations, une mise en visibilité problématique de figures et de situations, dont l’exemplarité éthique et littéraire fait question. Enfin, l’appropriation d’un tel lexique moral et juridique, l’élargissement de celui-ci à des cas plus généraux de rupture des règles ou des codes, posent également question quant aux pratiques et aux corpus artistiques concernées par ce genre d’auto-définition.
Nous envisagerons plus largement la nature de réponses proprement littéraires à des situations de bouleversements politiques, sociaux et économiques, qui reflètent la crise de l’autorité symbolique de l’Etat, et l’expression de celle-ci par la loi. Quelle peut être l’articulation littéraire de situations-limite, telles que l’impunité, la clandestinité, la désobéissance, la rébellion, le scandale, l’outrage, etc. ? Ce sont autant de manières d’interroger la loi à partir de sa limite, son dehors, lequel demeure, semble-t-il, en attente d’une reconnaissance par un discours capable de lui « rendre justice ».
1« Y además, sigo creyendo que para escribir hay que ponerse en la posición que predicaba Villon, el poeta medieval francés, la del fuera de la ley. Se escribe fuera de la ley. Siempre. Se escribe contra la ley. Nunca se escribe desde la ley. » Roberto Bolaño et Dunia Gras Miravet, « Entrevista con Roberto Bolaño », in. Cuadernos Hispanoamericanos, n°604, p. 65 (Nous traduisons). Cité par Miguel Casado, « Littéralement et dans tous les sens », in. Europe, 1070-1071-1072, juin-juillet-août 2018, p. 86-100
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24/07/2018