Le gibier divin
Plutarque, Sylla, 55.
Un soir, deux éclaireurs envoyés par Sylla
Dans le val le plus noir des monts Acrocéraunes
Débusquèrent de l’herbe, entre deux buissons d’aulnes
Un satyre attolé qui s’était blotti là.
Il voulut fuir, grimper, bondir : on l’accula.
En guerre chez les dieux, Rome traquait les faunes,
On traîna celui-ci devant les aigles jaunes,
Et le vieux conquérant lui-même lui parla.
Il demanda son nom, sa nocturne origine,
S’il était bien de ceux que le pâtre imagine
Sous les flots verts des bois… Le captif immortel
Répondit. Mais sa voix que nul ne put comprendre
Faisait gémir l’airain suspendu sur l’autel,
Et son grand corps plein d’ombre était couleur de cendre.
Pierre Louÿs
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28/12/2017