DE LA RÉCEPTION ET DÉTECTION DU BARATIN PSEUDO-PROFOND
GORDON PENNYCOCK | JAMES ALLAN CHEYNE | NATHANIEL BARR
DEREK J. KOEHLER | JONATHAN A. FUGELSANG | AVEC CRAIG DALTON
DE LA RÉCEPTION ET DÉTECTION DU BARATIN PSEUDO-PROFOND
suivi de BARATIN POUR VOUS, TRANSCENDANCE POUR MOI
suivi de ÇA RESTE DU BARATIN
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Christophe Lucchese.
chez Zones/Sensibles éditions
« Dans De l’art de dire des conneries, le philosophe Frankfurt définit le baratin comme quelque chose qui, destiné à impressionner, est échafaudé en l’absence de préoccupation directe pour la vérité, distinguant ainsi le baratin du mensonge, lequel intègre une manipulation et une subversion intentionnelles de la vérité (du moins celle qui est comprise par le menteur). Il ne fait aucun doute quant au fait que le baratin soit un phénomène bien réel et loin d’être marginal. Compte tenu de l’évolution technologique des moyens de communication et de l’augmentation subséquente de la quantité d’information disponible provenant des sources les plus diverses – expertes ou non –, jamais le baratin n’a été aussi présent. En dépit de ces apparents lieux communs, le baratin n’a, à notre connaissance, pas fait l’objet d’un examen. Les gens sont-ils en mesure de détecter une fumisterie manifeste ? Qui est plus susceptible de tomber dans le panneau ? Et pourquoi ? »
Bien que le baratin fasse partie du quotidien et que les philosophes s’y soient intéressés, sa réception (critique ou candide) n’a (à notre connaissance) pas fait l’objet d’un examen empirique. Nous nous attachons, pour notre part, au baratin pseudo-profond, à ce baratin constitué de déclarations a priori imposantes qui, données pour vraies et présumées sensées, sont en fait dénuées de sens. Ainsi avons-nous présenté à des participants des énoncés fumeux, établis librement à partir de mots en vogue et agencés dans des énoncés qui, pour respecter la syntaxe, ne permettent pas de discerner le moindre sens (ainsi de « la complétude apaise les phénomènes infinis »). Dans nombre de cas, la propension à juger le baratin de profond a été associée à plusieurs variables conceptuellement pertinentes (comme le style cognitif intuitif ou la croyance surnaturelle). D’autres associations, moins évidentes, ont accompagné l’appréciation d’énoncés plus terre à terre (« quelqu’un de mouillé ne craint pas la pluie ») voire banals (« les nouveaux nés requièrent une constante attention »). Ces résultats viennent appuyer l’idée que des personnes sont plus réceptives que d’autres à ce type de baratin, et que sa détection n’est pas tant affaire de doute systématique que de discernement des à-peu-près fallacieux que renferment ces assertions autrement imposantes. Nos résultats suggèrent également que la tendance à accepter des déclarations comme vraies peut jouer un rôle non négligeable dans la réception du baratin pseudo-profond.
Les auteurs de De la réception et détection du baratin pseudo-profond, publié en français par Zones sensibles en juin 2016, se sont vus décernés le Ig Prix Nobel de la Paix 2016 pour leur étude sur le baratin pseudo-profond. Champagne !
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2/11/2017