Le Gros
Extrait de la préface de Pascal FRANCAIX : « Cinéphile boulimique autant qu’érudit, infatigable défenseur du cinéma populaire, Didier Lefèvre mélange les genres et (em)brasse les références au sein de son récit haut en couleur et très filmique. Comédie noire, farce bouffonne, polar provincial ancré dans un Nord déprimant, soap opera prolétarien mâtiné d’épouvante, « Le Gros » adopte des accents multiples pour dire la cauchemardesque banalité du quotidien, sa pesanteur épaisse et suintante. Les images se bousculent et percutent. La main coupée de la sorcière, cachée dans le tiroir d’un établi (ce pourrait être celle d’une Barbara Steele décatie, rongée par l’éthylisme) ; les mouches gobées par François en guise de régime amaigrissant (comment ne pas penser au Renfield de « Dracula » ?) ; la promenade en forêt qui tourne au massacre (les Créatures célestes de Peter Jackson ne sont pas loin) ; le décor des friches industrielles nimbées de brume (un décor à la Simenon redessiné par l’expressionnisme)… Ces divers éléments suggèrent un « fantastique réel » dans la tradition de Marc Agapit, Gérard Prévot, ou Thomas Owen. Mais le ton amèrement picaresque, la vision noirissime et pourtant drolatique d’un monde en décapilotade, sont ceux des grands mauvais esprits de la littérature, des trublions cocasses et pessimistes que furent Frédéric Dard, Alphonse Boudard ou Louis-Ferdinand Céline. Il y a comme un parfum d’apocalypse miniature dans cette chronique de l’abjection ordinaire.
« Le Gros » demande à ses lecteurs des estomacs solides. Vous y trouverez à boire et à manger — et aussi un peu à vomir. Mais quand vous y aurez planté les crocs, il y a fort à parier que vous n’en ferez qu’une bouchée. »
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26/09/2017