UN TRIBUNAL ANARCHISTE
A la suite du meeting de dimanche, le Cri du Peuple a convoqué un jury composé de membres appartenant à tous les groupes révolutionnaires anarchistes, communistes, comité révolutionnaire central, agglomération parisienne, alliance socialiste, pour juger un des orateurs de la salle Lévis, Druelle, accusé d’être un faux frère, vendu à la police.
Le tribunal anarchiste s’est réuni, et après avoir adopté un rapport où l’on établissait que l’accusé avait dénoncé plusieurs citoyens qui se livraient à la fabrication de bombes explosibles et qu’il avait fourni à la préfecture le timbre du groupe, les forçats de Lille, il a déclaré à l’unanimité que Druelle était un agent secret de la deuxième brigade de recherches.
Condamné par le terrible tribunal, Druelle a protesté, et escorté de quelques amis, il a demandé à présenter sa défense lui-même. Le tribunal anarchiste, qui l’avait déjà condamné par défaut a bien voulu admettre sa requête, et Druelle allait comparaitre à sa barre, quand il a été arrêté par la police. L’Intransigeant et le Cri du Peuple reprochent au malheureux agent révolutionnaire de s’être laissé arrêter c’est la preuve, disent-ils, qu’il est de connivence avec la police. On sait que l’accusation d’être un agent secret équivaut, pour les groupes révolutionnaires à une condamnation à mort. H ne faut donc pas s’étonner si Druelle, condamné officiellement par un tribunal anarchiste, s’est laissé, pour se mettre à couvert de ce terrible jugement, si facilement jeter en prison. Si le gouvernement continue à user de tant de ménagements envers les factieux, ce sera le seul moyen d’échapper aux vengeances des tribunaux anarchistes révolutionnaires.
La Croix, 30 novembre 1884
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3/08/2017