Sivroche…
« Comme je sortais l’autre soir, vers les minuits, d’un théâtre où je remplis des fonctions variées, je vis, parmi la boue miroitante du boulevard extérieur, une maigre troupe de masques qui s’acheminait vers les faubourgs suburbains ». On savoure avec volupté ce début de nouvelle. On la garde un moment en bouche, on laisse advenir les hypothèses sur la suite. Mais, avant de s’encanailler au bal masqué, on se presse pour connaître l’auteur. Charles de Sivry. On n’en a jamais entendu parler. Béatrice Seguin qui s’occupa de longues années du fonds ancien de la bibliothèque de Boulogne-sur-Mer lève le voile. Et c’est presque un conte de fées : Maman est l‘élève de Chopin et c’est elle qui découvre Debussy. Elle croise Hugo. Quant à la demi-sœur de Charles, elle devient Madame Verlaine. Rimbaud vient dormir à la maison. On rencontre aussi Louise Michel, Charles Cros et Villiers de l’Isle-Adam. Entre autres.
« J’ai trouvé la clé des portes obscures », prétend le jeune savant de La Boule de verre, l’un des six textes rassemblés dans ce petit volume. Charles de Sivry, pianiste au Chat Noir et expert en fumisteries, la cherche partout. Il force la serrure de notre réel, distille avec gourmandise énigmes et fantasmes.
Sivry était doux et de petite taille. Honneur aux Âmes d’Atala d’avoir ressuscité le grand Charles, honteusement oublié. Ah oui, n’oubliez pas en sortant d’éteindre la bougie. Car sa lumière vacillante entretient le tourment du souvenir…
Robert Louis
Les mauvais sous, Charles de Sivry
Les Âmes d’Atala
juin 2015
ISBN : 978-2-914851-21-3
144 pages – 5 €
Article paru dans le n°19 de la revue Eulalie, éditée par le Centre régional des Lettres et du Livre Nord – Pas de Calais.
Laisser un commentaire
3/12/2015