Deux siècles de malédiction littéraire
Pascal Brissette et Marie-Pier Luneau (dir.), Deux siècles de malédiction littéraire
Presses universitaires de Liège, 2014.
Transvaluant les signes de l’échec et de la réussite, la malédiction de l’écrivain est l’un des grands mythes de la littérature moderne. « Il faut des malheurs, et des plus grands, pour faire ce qu’il y a de plus beau dans le plus beau des arts », écrivait un Louis de Bonald. « Le ressentiment est nécessaire à toute création artistique véritable », écrit plus près de nous un Michel Houellebecq.
Ce mythe de la malédiction n’en est pas moins une croyance vécue, ayant orienté des vies entières d’artistes et d’écrivains. Un vaste continent de maudits se dessine ainsi, du XIXe au XXIe siècle, où le poète crotté voisine avec le styliste martyr de son art, où le nègre de génie le dispute au grand artiste sombrant dans la folie, où l’écrivain populaire ne se prive pas quelquefois de cette forme singulière de légitimité que procure le malheur.
Le propos du présent volume n’est pas de dresser un nouveau palmarès des poètes maudits ou des acteurs obscurs de la scène littéraire, mais d’examiner les conditions de perpétuation d’une croyance — le malheur de l’auteur comme fondement de la valeur d’une oeuvre — à travers un ensemble de textes et d’images débordant les limites géographiques et culturelles de la France.
Sommaire :
Pascal Brissette et Marie-Pier Luneau – La malédiction littéraire en régime vocationnel : considérations introductives.
I. Médiateurs et médiations
Sarah Mombert – L’anti-magistère poétique d’Aloysius Bertrand ;
Cynthia Harvey – De la malédiction à la libération : l’exemple de Nélida ;
Pascal Durand – L’art de la guigne en 1862 : contexte, intertexte et sous-texte du Guignon de Mallarmé ;
Gabrielle Roy-Chevarier – De l’utilité de la maladie : les avantages et bénéfices romanesques de la maladie dans À la recherche du temps perdu ;
Solenn Dupas – Portraits de maudits : l’image au service du mythe de la malédiction littéraire dans la seconde moitié du XIXe siècle ;
Marie-Ève Riel – « Il me prend des envies de ne plus retourner à Paris » : fortunes et infortunes dans les maisons d’écrivains ;
Yves Thomas – La ville, l’enfer : un rite de passage dans l’ici-maintenant ;
Arnaud Bernadet – Du poncif : littérature et malédiction ;
Anthony Glinoer et Éloïse Pontbriand – Les Martyrs de la Brasserie : être bohème à en mourir.
II. Perpétuation et contestation du mythe
Jérôme Meizoz – Jules Vallès face aux « martyrs lugubres de l’ambition littéraire » ;
Denis Saint-Amand – Anomie de Rimbaud ;
David Vrydaghs – Les surréalistes sont-ils des poètes maudits ? Les réécritures surréalistes du mythe de la malédiction littéraire ;
Jean-Philippe Martel – « Inutile de jouer les révoltés » : Roger Nimier ou la malédiction par ses marges ;
Marie-Hélène Larochelle – « Étron des Pléiades » comme titre de gloire ;
Zacharie Signoles-Beller – L’artiste maudit dans l’œuvre de Mac Orlan : un mythe mis à distance ? Lecture du Quai des brumes (1927) et de François Villon (1944) ;
Pierre Hébert – Louis Dantin : le refus de la malédiction comme reconnaissance ;
Nathalie Heinich – Que faire d’un mythe ? L’imaginaire entre réel et symbolique (petit manifeste anti-postmoderne).
III. Assimilations et transferts
Martine Lavaud – Portrait du scientifique en poète maudit : les paradoxes de la IIIe république ;
Marta Caraion – La malédiction, sciences et industrie : une stratégie d’intégration littéraire ;
Eli MacLaren – La malédiction littéraire au Canada anglais : le cas de Lionel Stevenson ;
Pascal Brissette – « Tel l’érable de la forêt canadienne… » Grand homme et poète malheureux dans le Canada du XIXe siècle ;
Marie-Pier Luneau – La misère des riches. Réflexions sur la malédiction en régime de grande diffusion ;
Juan Zapata – Un poète maudit en Colombie était-il possible ? Le cas de José Asunción Silva (1865-1896).
Bibliographie
Index
Liste des illustrations
Notices bio-bibliographiques
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12/07/2014