darien
Clique nom de dieu !
« Parmi les nombreuses et ridicules croyances des malheureux, figure celle-ci: leurs misères doivent nécessairement exciter la sympathie. C’est, vraiment, la plus tenace de leurs convictions. On ne saurait trop, dans leur intérêt même, leur démontrer à quel point une telle croyance est grotesque. Si les déshérités étaient les victimes d’un sort impitoyable, et s’ils ne pouvaient en aucune manière améliorer leur position, sans doute conviendrait-il de les plaindre, et peut-être de porter jusqu’à l’amour la pitié inspirée par eux. Mais il n’en est point ainsi. Les malheureux, en dépit de la chanson, ne sont pas malheureux malgré eux. Ils ne le sont que parce qu’ils le veulent bien. Ils ont eux-mêmes placé leurs cous sous le joug, et refusent de les retirer. Il est donc fort compréhensible qu’un certain nombre d’hommes n’éprouvent à leur endroit aucune compassion, et qu’ils ressentent même de la colère et du dégoût pour tant de sottise et tant d’avilissement. » (Georges Darien, L’Ennemi du peuple, 1er décembre 1903)
« […] Somme toute, la misère n’est supportable (avec ou sans guillemets) que tant qu’elle est supportée, et l’intransigeance de Darien se justifie pleinement. Le peuple dont il dénonce et abomine la passivité, c’est la cohorte des pétochards, des résignés et des veules. Ce sont, dès l’enfance, les écoliers qui subissent punitions et brimades sans semer le boxon en classe. Ce sont les salariés qui se laissent exploiter par leur patron sans saboter leur turbin. Ce sont les cheffaillons qui usent de leur pitoyable autorité sans s’apercevoir qu’elle ne fait pas seulement d’eux des esclaves, mais aussi des kapos. Ce sont les grévistes qui capitulent sans foutre le feu à l’usine. Ce sont les mal mariés qui ne plantent pas là leur conjoint(e) pour aller tremper leur zob ou dissiper leur chatte où bon leur semble. Ce sont les femmes tabassées qui ne rendent pas les gnons au centuple. Ce sont les vioques qui se laissent embastiller dans des maisons de retraite où ils n’auront rien d’autre à glander qu’à attendre la mort en s’emmerdant. Ce sont les électeurs qui croient changer leur sort en votant pour une crapule plutôt que pour un imbécile, ou inversement. Ce sont les fidèles qui écoutent leur curé, leur pasteur, leur imam, leur rabbin, leur bonze ou leur gourou au lieu de lui crever la panse. Ce sont les blaireaux qui gobent les spectacles les plus débilitants sous prétexte de se distraire. Ce sont les vacanciers qui partent en troupeaux se faire bronzer les miches à dates fixes. Ce sont les acheteurs de bagnoles, les clients de boîtes échangistes, les supporters d’équipes sportives, les gobeurs de bobards.
C’est vous, c’est moi chaque fois que, par faiblesse ou par ignorance, par trouille ou par lassitude, nous acceptons d’être bernés, dominés et entubés.
Le jour où ce populo-là prendra enfin conscience qu’il peut choisir son sort et non le subir, ça va chier : « Sans acte, le mot n’est rien. Il a besoin de l’harmonie du poing sur la table, du son de l’explosion, du coup de feu pour cette cuisine magique qui inscrit à l’heure fatale tout le réfractaire de notre dissonance. » (Jean-Marc Rouillan, Lettre à Jules, 2004) » [Jean-Pierre Bouyxou]
Polonais et Russes autour de Flaubert et de Maupassant
SAMEDI 23 Novembre
Colloque organisé en partenariat avec l’association POL’ART : « Polonais et Russes autour de Flaubert et de Maupassant »
Matin
à l’Hôtel des Sociétés savantes
9h15 : Daniel Fauvel, «Les Polonais dans le département de la Seine-Inférieure de 1830 à 1870»
9h50 : Emmanuel Desurvire, «Charles-Edmond Chojecki et Gustave Flaubert : parcours d’une amitié»
Pause
10h30 : Lioubov Savova, «Nabokov et Flaubert»
11h15 : Alexandre Zviguilsky : «L’obsession tourguénievienne dans les trois derniers romans de Maupassant»
Après-midi
au Théâtre des Arts, dans la Salle Camille Saint-Saëns
15h : Présentation par Damien Dauge et l’association POL’ART du compositeur Antoni Orlowski (1811-18 61), ancien directeur de l’orchestre du Théâtre des Arts
15h30 : Concert par Emmanuelle Moresco, violon et Laurent Lamy, piano
Orlowski, Sonate pour piano et violon op. 6, Rondo brillant pour piano op. 7, Grand duo pour violon et piano op. 24
Chopin, Andante spianato et Grande Polonaise brillante op. 22
LMG : Ni fleur ni couronne
Samedi 21 à 10h00 : visite des couronnes d’artistes
Le doloromètre universel
Le doloromètre universel, recueil de nouvelles de Philippe Gontier.
6 Euros. Edité par les éditions de la Clef d’argent.
«Au fil des semaines, des câbles annelés comme des vers et des faisceaux de fils ténus comme du chanvre sinuèrent sur le plancher, coururent le long des plinthes et jusque sur les murs, se vrillèrent autour de la rampe de l’escalier ou pendirent du plafond telles des lianes. Les cloisons au papier peint fleuri choisi jadis par son épouse se couvrirent d’un désordre de rupteurs, de voltmètres, d’ampèremètres, de rhéostats, de coupe-circuits, de contacteurs aux manettes de bakélite, d’isolateurs de porcelaine. Sous l’emprise de ce réseau qui s’étendait et se complexifiait chaque jour davantage, la maison prenait peu à peu un aspect organique troublant.»
Faut-il être fou pour s’imaginer qu’il est possible de mesurer la douleur du monde? Faut-il avoir perdu la raison pour craindre de tomber vers le haut? Peut-on seulement comprendre le monde, supporter l’absurdité de l’existence lorsqu’on a toute sa raison? Les protagonistes des sept nouvelles qui composent ce recueil prétendent, à leur manière, apporter des réponses à ces dérangeantes questions.
«Les amateurs de fantastique devraient avoir un service d’abonnement pour ce genre d’ouvrage et être assurés de les recevoir dès parution. Des amateurs de ce fantastique qui a pour grands maîtres Villiers de l’Isle Adam ou Guy de Maupassant.» Noé Gaillard, Murmures. «Le recueil de nouvelles est un exercice périlleux qui peut devenir jubilatoire lorsque, par talent ou par hasard, l’auteur parvient à ses fins. Or ici, il n’est nul question de hasard, seulement de talent. Celui d’un conteur né, au style impeccable et ciselé.» Zal Gosse. «Une réussite autant pour son style limpide et percutant que pour ses intrigues.» Les Embuscades d’Alcapone. «Dans ces textes, “la nuit s’instal(le) doucement” pour ne jamais laisser place à la lumière.» Fabienne Leloup. «Un auteur et ses textes à découvrir d’urgence.» Lectuerie. «Pas de fantastique agressif avec monstres et créatures allégoriques, mais comme un retour à l’imaginaire de notre enfance où la moindre image, le moindre ressenti pouvait entraîner l’esprit dans des mondes dont on peut se forger une perception rien qu’en regardant un nuage.» Paul Maugendre. |
Table :
Cliquer sur les titres en gras vous permet de lire les premières pages des textes correspondants. Cinq contes à la plume Vertige, p.11 Le doloromètre universel, p.17 À Charenton-le-Pont, p.29 La Force, p.39 Le nuage, p.45 Pouilly-en-Auxois fantastique |
Spécialiste de la culture populaire et fantastique, notamment dans le domaine littéraire et cinématographique, Philippe Gontier a édité de nombreux fanzines consacrés aux arts de masse dont le plus récent, Le Boudoir des Gorgones, a permis de redécouvrir une foule d’auteurs oubliés. Nous lui devons également Trains de cauchemar, anthologie d’épouvante et d’insolite ferroviaires.
Couverture: photomontage de l’auteur d’après une photographie de Guillaume Duchenne de Boulogne.
Collection KholekTh n°23.
11 x 17,5 cm. 98 p.
Imprimé sur bouffant blanc. Couverture couleur pelliculée mat.
Schwob et « Les cahiers de curiosités »
En référence aux cabinets de curiosités, « Les cahiers de curiosités », nouvelle collection de la maison d’édition charentaise Marguerite Waknine, rassemblent « des textes d’hier et d’aujourd’hui qui présentent un tel caractère unique, insolite et rare ». Le septième livret offre une réédition de La Croisade des enfants, un des textes de Schwob qui incarnent le mieux ces critères, ainsi que de neuf contes publiés dans L’Écho de Paris, non repris à l’époque en recueils, et remarquables par leur diversité. Selon le principe de la collection, les feuillets simplement pliés présentent les récits de façon claire, soignée et originale, puis en addenda des « repères » sur l’auteur et les œuvres rééditées, notamment sur l’énigmatique Croisade dite des enfants. Au catalogue, les contes de Marcel Schwob voisinent, entre autre bonne compagnie, avec des textes de Johannes Kepler, de Victor Segalen, d’Hégésippe Moreau, de René Crevel, de Charles Cros et de l’éditeur soi-même : Franck Guyon.
Marcel Schwob, La Croisade des enfants suivi de Nouvelles de L’Écho de Paris, éditions Marguerite Waknine, « Les cahiers de curiosités », Angoulême, 2013. 8€.
info : Marcel Schwob