Lamentation d'un poil de cul de femme
La Folie polaire est aussi la folie vernienne où on découvre des choses tout à fait épatantes rapport au très chaste Jules Verne que nous connaissons par ailleurs tous et toutes. Et notamment cette Lamentation d’un poil de cul de femme défrichée rafraichie pour l’occasion…
Il est dur lorsque sur la terre
Dans le bonheur on a vécu
De mourir triste et solitaire
Sur les ruines d’un vieux cul.
Jadis, dans un forêt vierge,
Je fus planté sur le versant
Qu’un pur filet d’urine asperge,
Et parfois un filet de sang.
Alors, dans ce taillis sauvage,
Les poils poussaient par mes sillons;
Et sous leur virginal ombrage
Paissaient* de jolis morpions.
Destin fatal ! un doigt nubile
Un soir par là vint s’égarer,
Et de sa phalange mobile
Frotter, râcler et labourer.
Bientôt au doigt le vit succède,
Et, dans ses appétits ardents,
Appelant la langue à son aide,
Il nous déchire à belle dents.
J’ai vu s’en aller nos dépouilles
Sur le fleuve des passions,
Qui prend sa source dans les couilles
Et va se perdre dans les cons.
Hélas ! l’épine est sous la rose,
Et la pine sous le plaisir…
Bientôt, au bord des exostoses
Des chancres vinrent à fleurir.
Les coqs de leur crête inhumaine
Se parent dans tous les chemins :
Dans le département de l’Aine
Gambadent** de jeunes poulains.
Mais quand le passé fut*** propice,
Pourquoi songer à l’avenir ?
Et qu’importe la chaude-pisse,
Quand il reste le souvenir ?
N’ai-je pas vu tous les prépuces
Avoir chez nous un libre accès,
Alors même qu’ils étaient russes,
Surtout quand ils étaient français !
J’ai couvert de mon ombre amie
La grenette de l’écolier,
Le membre de l’Académie,
Et le vit du carabinier;
J’ai vu un vieillard phosphorique,
Dans un effort trop passager,
Charger avec son dard étique
Sans parvenir à décharger.
J’ai vu — mais la motte déserte
N’a plus de flux ni de reflux,
Et la matrice trop ouverte
Attend vainement le phallus.
J’ai perdu, depuis une année,
Mes compagnons déjà trop vieux,
Et mes beaux poils du périnée
Sont engloutis dans divers lieux.
Aux lèvres des jeunes pucelles,
Croissez en paix, poils ingénus !
Adieu, mes cousins des aisselles,
Adieu, mes frères de l’anus !
J’espérais, à l’heure dernière,
Me noyer dans l’eau des bidets,
Mais j’habite sur un derrière
Qu’hélas ! on ne lave jamais.
— Il eut parlé longtemps encore,
Lorsqu’un vent vif précipité,
Bruyant, mais non pas inodore,
Le lança dans l’éternité.
Ainsi tout retourne dans la tombe,
Tout ce qui vit, tout ce qui fut,
Ainsi tout change, ainsi tout tombe,
Illusions… et poils de cul.
George WF Weaver à qui nous devons cette retranscription dit avoir modifié le texte de l’édition 10/18, semblant fautive en plusieurs endroits :
* Passaient
** Bombardent
*** fort
La ponctuation, assez fantaisiste a été elle aussi modifiée par endroit.
5 commentaires pour “Lamentation d'un poil de cul de femme”
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11/02/2012
Je ne me contente pas de le dire, chères Ames : j’ai réellement remplacé les trois mots signalés en notes, qui sont ceux que l’on lit dans l’édition 10/18.
J’ai tout simplement comparé ce texte imprimé avec différentes versions disponibles sur la Toile, et il m’a paru évident que les correcteurs se lâchaient pas mal la bride, à l’époque, chez Bourgois (qui à coup sûr devait pas les payer lerche)…
Alors, je signale tout de même une ou deux petites choses :
– L’attribution à Verne n’est pas prouvée bien que la suspicion est grande à son égard.
– C’est Pascal Pia qui aurait découvert le lien entre ce poème et Verne dans le Magazine littéraire en 1970 à propos de l’anthologie publiée chez Kistemaeckers en 1881
– La chasteté vernienne est assez relative, on le découvrira dans sa correspondance. Du reste Marc Soriano pointe les propos volontiers scatologique de Verne tant dans ses échanges privés que dans ses écrits.Quant aux allusions sexuelles, elles sont vivement dissimulées, à un point que l’existence d’une maîtresse et des allusions à son égard ont été vivement étouffées par Hetzel.
– Notre amis George a fait la retranscription avec des corrections. Hélas, il ne donne pas la source de cette révision. Est-ce d’après l’édition originale ?
– Une Folie polaire publiera de temps à autre quelques textes « excentriques » de Jules et reproduira le poème non plus dans les commentaires mais dans un billet et, à ce titre va se mettre à rechercher l’édition originale de son côté…
Enfin, le Tenancier remercie, c’est bien le moins !
Pourquoi ne pas avoir maintenu dans le texte les mots qu’a relevés George dans leur forme erronée et proposée leur rectification en note ? Il me semble que c’eût été plus fidèle à l’édition ?
Que de commentaires dites-donc !
Chère ArD, c’est effectivement ainsi que l’on procède d’ordinaire, mais l’édition 10/18 (seul texte imprimé dont je dispose) est à l’évidence tellement fautive que j’ai préféré rectifier directement dans le corps du texte, en m’appuyant comme je l’ai dit sur d’autres leçons disponibles sur le Net et en usant d’un peu de bon sens.
Maintenant, reste plus qu’à attendre que le Tenancier déniche l’édition de 1881. Ou que je retombe sur ce « Magazine littéraire » de 1970.