Curiosa
Camélia Jordana
Françoise Pascal, préface d’Aurore Evain
Créée en 1662, cette farce met en scène un barbon avare qui refuse de marier sa fille, afin d’éviter des dépenses, et qui se met en quête d’une jeune épouse. Forcé de s’absenter, il confie la garde de sa fille Isabelle à Philipin, son valet. Dorine, la servante d’Isabelle dont est épris le valet, éloigne ce dernier pour permettre à la jeune fille de retrouver Cléandre, son jeune amant. Le maître de maison rentrant plus tôt que prévu, Cléandre n’a que le temps de se déguiser en fille pour échapper à sa colère. Dupé par le déguisement du jeune homme, le vieillard en tombe fou amoureux et, ce n’est qu’à la nuit tombée qu’il le démasquera. Appuyé par Isabelle, Dorine et Philipin, Cléandre réussira à convaincre le vieux barbon de le laisser épouser sa fille.
Françoise Pascal fut une peintre réputée, dramaturge remarquée qui participa à la remise en vogue de la « pièce comique », ce qui n’empêche pas son œuvre de parcourir toutes les formes dramatiques de l’époque : farce, tragi-comédie romanesque, tragédie chrétienne et pièce à machines. Tout comme Molière, elle fut influencée par la Commedia dell’arte et elle fut la première femme à voir ses pièces jouées par des troupes professionnelles.
L’obscène maintenant : nouveaux usages, nouveaux enjeux, nouvelles formes
Appel à contribution pour un volume collectif
Date limite 1er juin 2020
Autrefois confinée à l’intimité de l’appartement privé du psychanalyste Jacques Lacan, où cachée sous une toile du surréaliste André Masson elle était réservée à quelques rares regards, L’Origine du monde de Gustave Courbet s’expose désormais à la vue du plus grand nombre au Musée d’Orsay. En même temps, la même image, pourtant reproductible à l’infini dans la sphère numérique, s’attire les foudres des censeurs de Facebook qui – prétextant une infraction aux règles du site en matière de pornographie – ferment le compte d’un utilisateur français l’ayant postée à des fins pédagogiques. Loin d’être anecdotique, l’épisode invite à revisiter, sur un plan aussi bien critique qu’historique, l’obscène à l’ère contemporaine. Notoirement floue dans ses définitions, qu’elles soient esthétiques, juridiques ou politiques, l’obscénité se donne à penser comme geste plutôt que comme concept. Performance qui met en crise, de façon tantôt ludique tantôt résolument plus problématique, les conditions et de production et de réception des mots, des images et peut-être même des idées qui, en les transgressant, interrogent les dispositifs matériels et symboliques qu’ils investissent. La première modernité, déjà, s’est inquiétée de ce qu’un nouveau support – le livre imprimé – rend possible en reconfigurant non seulement ce qui se dit, se montre et se pense, mais surtout comment les mots et les images font sens. Qu’en est-il alors aujourd’hui des gestes obscènes à un moment où les nouveaux (im)possibles de la révolution numérique s’expérimentent, se négocient encore ? Du livre à l’hypertexte, de la scène théâtrale aux manifestations politiques, des discours philosophiques aux pratiques juridiques, des médias grand public à la blogosphère, quels sont les effets, esthétiques et politiques, l’efficacité même de mots, d’images et d’idées qui posent la question de leur obscénité ?
Cet appel à contribution pour un volume collectif en ligne s’inscrit dans le cadre du projet de recherche franco-américain « Politiques de l’obscène : l’obscénité et ses médias, de Gutenberg au numérique » soutenu par le Thomas Jefferson Fund de la FACE Foundation et l’Institut Universitaire de France. Il fait suite au colloque international qui s’est tenu à l’Université de Bordeaux les 4 et 5 novembre 2019 sur ces questions.
Pour davantage de développements : https://poliobs.hypotheses.org
Nous invitons les contributeurs – en français ou en anglais – à s’interroger sur les enjeux que pose aujourd’hui l’obscène à la lumière de la « médiasphère » contemporaine – par quoi nous entendons, au sens large, les dispositifs matériels et symboliques qui régissent et la production et la réception des mots, des images et des idées. Le volume se veut interdisciplinaire (spécialistes de la littérature, des études visuelles, cinématographiques et médiatiques, de la philosophie, de la sociologie, du droit et du journalisme).
L’article est à envoyer avant le 1er juin 2020 aux coordinateurs du volume collectif :
Nelly Labère (Université de Bordeaux) : nelly.labere@u-bordeaux-montaigne.fr
Peter Frei (Université de Californie, Irvine) : pafrei@yahoo.com
Lettres du mauvais temps – Correspondance 1977-1995
Jean-Patrick Manchette
Correspondance rassemblée par Jean Guyon, Nicolas Le Flahec et Gilles Magniont. Préface de Richard Morgiève.
La Table Ronde,
Coll. « La petite vermillon »
Souvent reclus mais jamais indifférent, Jean-Patrick Manchette (1942-1995) cherche et trouve enfin dans sa correspondance la voie d’un renouvellement créatif ; dans une sorte d’art poétique en fragments, il cause, parfois avec humour et toujours avec énormément de soin, du style, du polar, de la traduction, de l’économie du livre, du cinéma, de l’art et de la marchandise; il s’entretient avec de grands auteurs – tels Pierre Siniac, Jean Echenoz, Robin Cook, ou les Américains qu’il aime et parfois traduit, de Donald Westlake à James Ellroy en passant par Ross Thomas – mais se montre aussi attentif et précis lorsqu’il s’agit de répondre à ses lecteurs, alors même qu’il refuse régulièrement (et parfois vertement !) contributions et invitations officielles. Ainsi, la correspondance laisse percevoir les voies singulières par où Manchette communiquait sa « fraternité contenue », en même temps qu’elle fait entendre les échos d’une époque, ses controverses politiques aussi bien que ses déflagrations violentes, des soubresauts du terrorisme aux premières émeutes de banlieue.
Pour accompagner ces lettres, des notes permettent une rapide contextualisation biographique ou historique. Ou encore suggèrent un lien avec d’autres textes (critiques ou romanesques) de Manchette : activité d’écriture capitale à ses yeux, la Correspondance constitue en définitive un élément essentiel de son ouvre, par quoi l’écrivain cherche et finit par trouver cette grande forme qu’il convoite.
Jusqu’ici, n’ont été publiées, et de manière éparse, que quelques lettres de Jean-Patrick Manchette ; cet épais volume en rassemble plus de deux cents – dont un tiers traduites de l’anglais -, pour l’essentiel inédites. Elles couvrent les années 1977-95, du moment où Manchette commence à les archiver méthodiquement jusqu’à sa mort. Cette période, qui semblait coïncider avec un retrait progressif (plus de roman publié après La Position du tireur couché en 1981) est enfin rendue, grâce à ces lettres, dans tout son bouillonnement. Elles sont le reflet de la vie littéraire et artistique des années 1970-80.
Play it again, Dupont – Chroniques ludiques 1978-1980
Jean-Patrick Manchette
La Table Ronde
Recueil des chroniques ludographiques écrites par l’auteur de polars et scénariste à la fin des années 1970, pour la revue Métal hurlant.
« Il se trompe, y compris sur lui-même, l’amateur qui croit vouloir reproduire la réalité dans le jeu, par une simulation de plus en plus précise. Ce qui fait l’intérêt d’un wargame sur la bataille de Waterloo, par exemple, c’est évidemment la possibilité que Napoléon gagne. Le désir de l’amateur de jeu est de se rapprocher de plus en plus de la réalité pour s’en éloigner sans cesse davantage. L’amateur de jeu est un être borgéso- dialectique. L’amateur de jeu est un être plus monstrueux encore que le borg, sur qui nous allons revenir dans un instant. ». J.-P. Manchette
Numéro 5 des Cahiers Bataille : « Bestiaire Bataille »
– Présentation des Cahiers Bataille :
La revue Cahiers Bataille paraît depuis 2011 aux Editions les Cahiers, spécialisées dans la publication de cahiers d’auteurs tels que Louis Aragon, Antonin Artaud, Laure, Michel Leiris et Georges Bataille.
Chaque numéro des Cahiers rassemble une pluralité d’études, d’entretiens, de témoignages, d’hommages, de textes littéraires et de documents iconographiques. Les horizons divers de ses contributeurs offrent une lecture croisée de l’auteur et de son œuvre, aussi bien que de son héritage dans la réflexion et la création contemporaines.
Après le numéro 4, paru sous la forme d’un « Dictionnaire critique » consacré aux concepts développés par Georges Bataille dans son œuvre, nous souhaitons à présent que la cinquième livraison de la revue soit dédiée aux animaux qui parcourent les récits, les romans, les essais, les articles, les poèmes, les notes etc. de l’auteur.
– Argument :
1. Il semble que dans la théorie de Bataille, les animaux, toutes espèces confondues, appartiennent au plan de l’immanence, au sein duquel aucune distance ne les oppose au milieu dans lequel ils vivent. L’animal et le monde extérieur demeurent comme soudés. Un lien invisible et inextricable semble les unir jusqu’à la fusion. Une fameuse formule puisée dans la Théorie de la religion affirme fortement cette absence de séparation entre l’animal et son milieu : « tout animal est dans le monde comme de l’eau à l’intérieur de l’eau » (Théorie de la religion, OC, t. VII, p. 292). Cette thèse de Bataille prônant l’immanence de la vie animale semble exclure la possibilité d’envisager les animaux dans leur diversité et, par là, la possibilité d’un bestiaire.
2. Pourtant, ils sont nombreux à envahir la trame des livres de Bataille et à accompagner ses réflexions : corbeaux, rats, tigres, gorilles, chevaux, mouches, cochons, hiboux, loups, chats, crapauds, taureaux, crabes, canards, araignées etc. Ils peuvent annoncer le malheur (« c’était en même temps comique et sinistre, comme si j’avais un corbeau, un oiseau de malheur, un avaleur de déchets sur mon poignet », Le Bleu du ciel, OC, t. III, p. 129), rendre compte de l’état d’âme du narrateur (« Il me semble avoir un crabe dans la tête, un crapaud, une horreur qu’à tout prix je devrais vomir », Le Coupable, OC, t. V, p. 249), intervenir dans le présent en brisant la chaîne des événements et des réflexions (« J’ai de mon derrière une idée puérile, honnête, et tant de peur au fond. Mélange d’horreur, d’amour malheureux, de lucidité (hibou !)… », L’Impossible, OC, t. III, p. 501), se rapporter à l’histoire personnelle de l’auteur (Bataille gardait toujours près de lui, sur son bureau, un crâne de cheval), troubler une histoire fictionnelle (« posée sur l’œil du mort, la mouche se déplaçait doucement sur le globe vitreux », Histoire de l’œil, OC, t. I, p. 604), servir de comparaison pour faire éclater une vérité (« l’acte sexuel est dans le temps ce que le tigre est dans l’espace », La Part maudite, OC, t. VII, p. 21), être un vêtement (le loup couvrant les yeux de Madame Edwarda, cf. OC, t. III), dramatiser une méditation (le ver luisant dans Méthode de méditation, cf. OC, t. V, p. 200), faire lien avec les humains (les singes humanoïdes et les animaux peints de Lascaux).
3. Au-delà de ces quelques exemples d’animaux bien réels, on retrouve également dans les écrits de Bataille des créatures, issues de la mythologie et de la tragédie grecques, telles que la Méduse et ses sœurs Gorgones, héroïnes d’une pièce de théâtre inédite, récemment retrouvée, La Méduse ; mais aussi le Sphinx, à la fois monstre mythologique dont l’importance évocatrice sur la vie personnelle de Bataille ne peut pas être négligée et – sous sa forme homophonique, Sphynx – une des plus célèbres maisons closes de Paris. On peut mentionner également le Minotaure, titre de la revue fondée par Albert Skira en 1933 dont le nom a probablement été avancé par Bataille lui-même. Ce monstre hybride revient à plusieurs reprises dans les réflexions de Bataille, entre autres dans l’article « Soleil pourri » paru dans Documents. Si les artistes et intellectuels de l’entre-deux guerres témoignaient d’un intérêt certain et généralisé pour la mythologie grecque, cela est sans doute dû à la portée universelle de ses archétypes mais peut-être aussi à la place grandissante que gagnait alors dans leurs cercles la psychanalyse freudienne, nourrie par les récits mythologiques d’Œdipe, de Narcisse ou du Minotaure. Par ailleurs, c’est au cours d’une cure psychanalytique, que Bataille a suivie en 1926 auprès du docteur Adrien Borel, qu’est née l’Histoire de l’œil, et sous impulsion de laquelle il a probablement composé d’autres textes, plus tardifs, tels qu’Histoire des rats (1947), clin d’œil à l’étude de Freud intitulée Homme aux rats qui relate le déroulement de la psychanalyse d’un jeune homme de 29 ans dont l’histoire ressemble curieusement à celle de Bataille.
4. Une figure singulière s’attache tout particulièrement au nom de Bataille, celle qui est devenue l’emblème et le nom d’un groupe et d’une revue, tous deux fondés en 1936 : Acéphale. L’homme nu à tête coupée, debout, aux bras écartés, une arme dans chacune de ses mains, a été dessiné par l’artiste André Masson ; non sans ridicule, sa silhouette ressemble à celle de l’homme de Vitruve de Léonard de Vinci. Acéphale est une créature nouvelle, aveugle à la raison, refusant de se soumettre au dictat de la tête. Il n’est plus un homme, ni un dieu, alors ressemble-t-il à un animal ? Bataille précise : « L’homme a échappé à sa tête comme le condamné à la prison. […] Il réunit dans une même éruption la Naissance et la Mort. Il n’est pas un homme. Il n’est pas non plus un dieu. Il n’est pas moi, mais il est plus que moi : son ventre est le dédale dans lequel il s’est égaré lui-même, m’égare avec lui et dans lequel je me retrouve étant lui, c’est-à-dire monstre. » (« La conjuration sacrée », OC, t. I, p. 445.)
5. Un autre pan de travaux de Bataille concerne la découverte des grottes préhistoriques, notamment celle de Lascaux, et le défi que cette découverte a lancé à l’homme moderne. Sur les parois peintes il y a 26 000 d’ans on retrouve presque exclusivement des représentations animalières : chevaux, bisons, rhinocéros, oiseaux, ours etc. Les figures humaines sont extrêmement rares. C’est par le biais de ces figures animales que Bataille, dans Lascaux et la naissance de l’art, tente de percer les secrets de l’homme du Magdalénien en pointant ainsi ceux de l’homme moderne.
6. Avec le goût pour ce qui résiste à la connaissance et qui est étrange, difforme, voire effrayant pour les sens, Bataille a su s’intéresser à des formes hybrides et baroques dont l’histoire nous laisse des traces sur des pierres gravées (intailles) gnostiques, sur des monnaies sassanides ou gauloises, dans les mythologies des civilisations précolombiennes, sans oublier les enluminures du manuscrit du XIe siècle appelé Apocalypse de Saint-Sever. L’imaginaire foisonnant de créatures bizarres, oubliées, ridicules, monstrueuses que Bataille a développé au fil de ses diverses études, la plupart publiées dans Documents, n’est pas seulement d’ordre esthétique, mais il permet également d’envisager ces figures difformes comme des étapes, des éléments ou des catalyseurs de la pensée de son auteur.
Créer un bestiaire à partir des textes de Bataille paraît non seulement possible mais s’avère également être une entreprise à la fois stimulante et inédite. Nous souhaitons, avec ce numéro, approcher de plus près l’univers des animaux et d’autres créatures, qu’elles soient mythologiques, chimériques, historiques, qui peuplent l’œuvre de Georges Bataille, en encourageant de manière à la fois ludique et théorique la réflexion philosophique, la critique littéraire, l’analyse des œuvres d’art et des objets archéologiques, ethnographiques, de culture populaire etc. ainsi que la création artistique. Le bestiaire Bataille n’a pas la vocation d’être un simple catalogue d’animaux, mais un outil permettant aux futurs lecteurs de découvrir autrement que par le biais d’abstractions, l’esprit et les rouages de la pensée de Bataille.
*
Modalités de soumission et d’évaluation :
Chaque article sera consacré à un animal ou à un ensemble d’animaux.
Les auteurs sont libres de choisir le sujet (animal) qu’ils souhaitent traiter ainsi que leur approche. Dans leur démarche, ils puiseront abondamment dans les écrits théoriques et/ou romanesques de Bataille ainsi que dans ceux d’autres auteurs qui leur semblent pertinents à l’égard du sujet traité.
À titre d’exemples, ci-dessous une liste non-exhaustive des animaux présents dans les écrits de Georges Bataille :
*
Les propositions d’article, de 20 lignes environ, accompagnées d’une bio-bibliographie de l’auteur et d’éventuelles indications iconographiques, doivent être envoyées à l’adresse suivante : nicola.apicella@gmail.com avant le 30 juin 2020.
La remise des articles est prévue pour le 1er novembre 2020.
*
Normes de rédaction :
Les articles devraient compter 30 000 signes environ (+/- 10%) espaces compris, soit 6-7 pages.
Interligne : simple ; marges : 2,5 cm ; caractère typographique : Times New Roman ; taille de police : 12.
Format de document : Word (.doc, .docx) ; le titre du document est le titre de l’article.
Les articles seront évalués en double aveugle par les membres du comité de lecture.