Babour zammar
Ammi Khémaïs pour les uns, Moulin Zalila pour les autres, dans une interview qu’il avait accordée à Néjib Belqadhi, s’est défini comme kerkennien têtu et anarchiste qui a en horreur toutes les injustices. 1948 : l’ouvrier militant syndicaliste et anticolonialiste Mouldi Zalila est appelé par l’armée française pour le service militaire, « plutôt mourir ». Amm Khmayyes déserte et rejoint les combattants palestiniens.
1957 : départ pour la France, comme travailleur immigré et sur le bateau qui l’emporte, il pressent, analyse, pense, vit à l’avance la profonde morsure de l’absence des êtres chers et de la nostalgie il écrit « babour zammar khachch el bhar… », le Bateau de l’immigration.
بابور زمّر خش البحر
عطى بالظهر
لارض الوطن عز الوكر
***
بابور زمّر خش الغريڨ
سالك طريق
ﭬدا أرض غربة تشيح الريڨ
عاطي بظهره لوجه الصديڨ
و ﭬلب الرفيڨ
وجوه الاهالي طافية صفر هم و كدر
***
بابور زمّر بالصوت عالي
عل الوطن جالي
يحمل شباب عالشعب غالي
ﭬداه اليدين ترعش تشالي
دمع الأهالي
يلذع و يجرح شبح النظر
حرڨ الشفر
***
بابور زمّر خاشش لبحره
ﭬدا أرض برة
لسماء صافية عاطي ظهره
يحمل شباب من أرض خضراء
لحياة مرة
كما يحمل الواد وﭬت المطر
عتوڨ الشجر
بابور زمّر هج مالوطن
في مثيل سن
يڤص الموج ﭬص الجبن
عل البحر أزرڨ خلـّف كفن
خلـّى السفن
عالشط ترعش خايفة الخطر
هاج البحر ماج البحر
***
بابور سافر عل العين غاب
تحت الضباب
محشي معبي بخير الشباب
وسڤوه للاجنبي بلا حساب
مثل الدواب
الفرڨ بينه و بين البڤر
جواز السفر
Le bateau siffle pénètre la mer
Et tourne le dos à la terre du pays
Cher berceau
Le bateau siffle s’éloigne et prend le large
Il s’en va vers la terre de l’exil qui dessèche
Il se détourne du visage de l’ami
Du cœur du compagnon
Les parents sont assombris et pâles
Tristesse et amertume
Le bateau siffle très fort
Fuit le pays et transporte les jeunes gens
Trésor du peuple
Les mains s’agitent et tremblent
Les larmes sont des morsures qui brûlent les paupières
Le bateau siffle et cingle en haute mer vers l’ailleurs
Il s’éloigne du ciel très clair
Et porte les jeunes du pays vert
Comme la vie est amère
Ils s’en vont comme les souches
Après la pluie sur la rivière
Le bateau siffle et déserte le pays
Il coupe les vagues
Comme une lame le fromage
Sur la mer bleue il traîne un linceul
Derrière lui les barques tremblent au danger
D’une mer agitée
Le bateau siffle
Loin du regard souffle le brouillard
Il emporte les jeunes entassés
Expédiés en vrac à l’étranger
Rien ne les distingue du bétail sinon
Le passeport.
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2/01/2018