Journal d’un anarchiste cambrioleur !
Nous ne sommes pas trop BD, c’est comme ça. Comme nous ne sommes ni thé ni café. Ni fromage ni dessert. Sauf qu’on fait quelques efforts concernant la bande dessinée. Celle-ci, c’est Aurélie qui nous en a parlé il y a quelques temps.
Ne vous arrêtez pas à la présentation de l’éditeur. Les auteurs disent s’être documentés à partir des livres édités par l’Insomniaque, l’Atelier de création libertaire et le Jacoblog que les lecteurs et lectrices d’Amer connaissent bien, et qui sont gages de qualité…
On en profite pour saluer Jean-Marc Delpech et faire suivre son billet sur la même BD…
Alexandre Marius Jacob (né en 1879) est un homme à la destinée extraordinaire ! Il aura sillonné les mers du globe, embrassé la cause anarchiste, constitué une « équipe de travailleurs de la nuit » créditée de près 500 cambriolages dans les demeures bourgeoises et les églises (pour donner aux pauvres), transformé son procès en tribune politique et survécu au bagne de Cayenne où il passa 22 ans…
Bref, un personnage « hors norme » qui tient tout à la fois d’Arsène Lupin, de Robin des bois et de Papillon.
– Un personnage rocambolesque, révolté et attachant.
– Le combat d’un « sans grade » contre les « puissants » : un propos terriblement actuel !
– Au dessin, Gaël Henry un disciple de Blain à l’instar de Loïc Guyon (L’Enragé du ciel).
L’auteur
Vincent Henry est né en 1966 à Brive-la-gaillarde et réside désormais en Touraine. Après des études commerciales et une carrière classique dans l’industrie, il décide de vivre ses passions et se lance dans le journalisme BD, puis la création d’une maison d’édition : La Boîte à Bulles. En 2013, il décide de franchir une nouvelle étape à la poursuite de ses rêves et a signé depuis plusieurs scénarios aux registres fort différents : La Boîte à Bulles en images (autobiographie de sa maison d’édition), Loulou ne veut pas grandir (BD jeunesse avec Stéphanie Bellat), puis début 2016 Alexandre Jacob, journal d’un cambrioleur anarchiste (avec Gaël Henry).
Le dessinateur
Gaël Henry est né en 1989 dans la porcelaine limousine, ce qui ne l’empêche pas d’avoir un dessin solide ! Diplômé en 2010 de l’Académie de Tournai (Belgique) en section Bande Dessinée, il a depuis voyagé un peu partout à travers le monde. Il vit et travaille à Lille en collaboration avec d’autres dessinateurs.
Et maintenant, ce qu’en dit le Jacoblog !
Les projets de bandes dessinées sur l’honnête cambrioleur ne manquent pas. Peu aboutissent toutefois. En 2006, Romain Louvel croquait les Souvenirs d’un révolté. L’ouvrage, auto-produit, s’arrête à ce que la presse avait nommé « le drame de Pont Rémy » en 1903. Il manque hélas la fin, c’est-à-dire la fuite dans la campagne picarde du voleur anarchiste puis l’arrestation à Airaines et la conduite à la prison d’Abbeville. Dix ans plus tard, Gaël et Vincent Henry ont imaginé, ont visualisé d’une manière globale la vie de labeur des Travailleurs de la Nuit. On aurait pu craindre un douteux et fallacieux amalgame en feuilletant le catalogue des éditions Sarbacane annonçant pour le mois de janvier 2016 l’histoire d’un « personnage hors norme qui tient tout à la fois d’Arsène Lupin, de Robin des Bois et de Papillon » ; et pourtant il n’en est rien. Bien au contraire, en 144 pages d’un dessin épuré, presque naïf, les deux auteurs parviennent à scénariser une histoire complexe sans tomber dans les éternels clichés de l’aventurier. C’est brillant, c’est drôle, c’est tragique et politique.
L’homme criminel devient anarchiste ; ses actes sont autant de reprises de possession au grand dam de ses victimes, toutes issues des rangs de la bourgeoisie, du clergé ou de la Grande Muette. Mais il ne fait pas bon crier « Ni Dieu ni Maître » ! Il ne fait pas bon non plus de s’attaquer à la propriété privée, à ses symboles et à ses sectateurs. La France de la Belle Epoque a peur ; les grandes feuilles à cinq sous – Le Petit Journal, Le Petit Parisien, etc. – vendent de l’insécurité à qui mieux mieux et c’est au bagne que la République envoie crever ses vaincus de guerre sociale. Thémis ne fera aucun cadeau à Alexandre Jacob que l’on suit depuis son embarquement sur les bateaux de la Compagnie des Messageries Maritimes à Marseille. Il va payer très cher son entreprise de démolition publique. C’est l’histoire vraie d’un honnête cambrioleur qu’ont superbement croquée ici Vincent et Gaël Henry. C’est brillant, c’est drôle, c’est vivant, c’est une leçon d’histoire de l’illégalisme en image qui ne devrait pas tarder à atterrir chez votre libraire indépendant préféré et ailleurs … et donc dans votre bibliothèque. Jacob : la BD recommandée par toutes les pinces monseigneur … et par le Jacoblog ! On attend impatiemment la suite.
Laisser un commentaire
22/01/2016