Cirques et esthétiques queer
Des contorsionnistes aux clowns, des jongleurs aux acrobates, des voltigeurs aux équilibristes, les différentes disciplines de cirque travaillent les corps, les façonnent, les transforment, les déforment. Ces corps sont souvent agencés dans des mises en scène exposant une virtuosité hors-norme. Le cirque regorge de représentations de corps jeunes, souples, puissants et tout à la fois ambigus, androgynes, transgenres, des corps à l’animalité exacerbée et régulièrement travestis, des corps restant fortement marqués par les corps atypiques des freaks exhibés autrefois dans les sideshows. Les ressorts spectaculaires qui y sont associés puisent massivement dans le bizarre, l’outrance, le kitsch.
« Bizarre », c’est l’un des sens anglais du terme « queer », cette insulte homophobe que la communauté LGBT des États-Unis s’est réappropriée à l’occasion d’un processus affirmatif d’identification. Transposé dans le champ esthétique, le queer, déjà investi notamment par la sociologie, apparaît comme un outil théorique permettant d’interroger non seulement le caractère genré des pratiques artistiques mais aussi la diversité et la complexité des représentations des identités et des sexualités que les œuvres proposent.
Dans le prolongement de la journée d’études « Scènes queer dans la littérature les arts et les médias » (2013) et du colloque « Esthétiques queer ? Transgression et subversion dans la littérature et les arts » (2014) organisés par LLA-CREATIS à l’Université de Toulouse II, nous proposons d’observer à la lumière du queer les productions circassiennes contemporaines mais aussi les traces laissées par les cirques du passé, sans négliger les représentations anciennes ou contemporaines du cirque dans les autres arts (littérature, cinéma, arts plastiques, séries, etc.) voire médias (émissions de télévision, blogs, vidéos, critiques, etc.). Il s’agira encore d’examiner les représentations nourries par l’imaginaire collectif attaché au cirque qui, entre nostalgie, stéréotypes et mythologies, résistent fortement dans bon nombre de mises en scène actuelles ainsi que dans les représentations que les autres arts en proposent, malgré les profondes (mais confidentielles ?) mutations que connaissent les arts du cirque à la faveur de leur récente institutionnalisation.
Dans un contexte où les arts du cirque fluctuent entre classicisme, expérimentation de formes nouvelles et persistance des clichés, où les artistes explorent, interrogent leur art et adoptent souvent une posture métacircassienne, le queer apparaît comme un outil théorique capable de remettre en question les contours identitaires et politiques des pratiques circassiennes elles-mêmes, prenant en compte non seulement les codes propres au cirque mais aussi ses multiples hybridations et mélanges avec les autres arts.
Nous invitons donc les chercheurs spécialistes en cirque, en études théâtrales, en littératures françaises et étrangères, en littérature comparée, en cinéma, en arts plastiques, en musique… mais aussi en communication, histoire, sociologie ou philosophie, à partir du moment où ils s’attachent au champ esthétique, ainsi que les artistes de toute discipline, qui ont produit des œuvres relevant du « queer », à nous proposer des communications et à envoyer un titre et un résumé d’une dizaine de lignes environ ainsi qu’une bio-bibliographie à Marion Guyez, Anne Pellus, Barbara Métais-Chastanier et Gilles Jacinto avant le 15 octobre 2014 (guyez_marion@yahoo.fr, anne.pellus@neuf.fr, giljacinto@aol.com, metais.chastanier.barbara@gmail.com)
Comité scientifique :
Muriel Plana, PR Études théâtrales, UT2J.
Élise Van Haesebroeck , MCF Études théâtrales, UT2J.
Renaud Bret-Vitoz, MCF Études théâtrales, UT2J.
Mireille Raynal, MCF Littérature et cinéma, UT2J.
Hélène Beauchamp, MCF Littérature comparée, UT2J.
Barbara Métais-Chastanier, MCF littérature contemporaine, Centre Universitaire Jean-François Champollion.
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5/10/2014